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LAIDE

— Le grotesque est partout, se dit gaiement Hélène. Ces plaisantes bêtes sont peut-être cause du bon rire goguenard de Diane, ajoute la jeune femme, qui devient païenne et anime l’astre que la science éteint ; peut-être Apollon qui se couche fait-il faire par l’arrière-garde de ses flocons roses ce défilé burlesque pour amuser sa sœur qui se lève ?

Mais les quenouilles se brisent dans les pattes des monstres. Ceux-ci embobelinés, confus, se ramassent et prennent la silhouette menaçante d’un ours colossal, dont les membres mal attachés, floconneux, se violacent et se séparent comme des chairs coupées vives. Le gros chien qui s’est avancé happe, la gueule ouverte, un morceau de l’ours, dont les restes s’entortillent aux replis du reptile ou s’accrochent aux ailes de la libellule. Ainsi finit la rencontre, loin de la lune, que ces amis et ces ennemis fragiles avaient la prétention d’attaquer et de défendre. Vainqueurs et vaincus blanchissent, se marbrent et vont se noyer dans les brumes de l’occident.