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LAIDE

de mœurs anciennement légères, il est calme de tout le calme acquis dans une longue existence de plaisirs recherchés et satisfaits. Il porte avec verdeur soixante-huit ans sonnés. Ayant épousé, dit ce prince, la vue d’une jolie femme, il est galant avec elle dans le monde, lui baise la main, lui fait la cour. Tout cela a un bel air de vieille noblesse, mais tout cela m’irrite et m’ennuie. Je tourmente ma princesse, je l’indigne, jusqu’à ce que blessée elle retrouve son insolence. J’ai alors le regret de mes injustices et la joie ineffable de ses pardons. Je dois renoncer à la rendre jalouse ; elle est trop sûre de sa beauté, et j’imagine que son mépris précéderait sa haine, si elle me croyait capable d’une infidélité. Elle est si certaine, dans son orgueilleuse sérénité, de n’avoir pas à redouter mes inconstances, qu’elle ne s’en prend qu’à mon éducation, à mon caractère, point aux désirs de mon cœur, et que je ne peux la troubler ni par un soupçon ni par une amertume.

» Hélène, je suis las de tant de douceurs ! Je