Page:Lambert - Mes sentiments et nos idees avant 1870.djvu/250

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nommée lieutenant-colonelle dans le régiment où le sargent distribuait les grades à la suite de George Sand me causa de la joie, et je reste fière d’avoir été désignée comme la seconde de la première entre toutes.

Mme Sand, en voiture, nous parla des femmes de plus en plus nombreuses qui lui paraissaient prendre conscience de leur valeur morale et intellectuelle.

« Autrefois elles étaient cinq, aujourd’hui elles sont cinquante, dit notre grande amie qui nous cita comme exceptionnelle Mme André Léo, et me conseilla de lire son premier et son dernier volume : Double histoire et Attendre et espérer.

Nous rentrons à Toulon et l’après-midi nous allons visiter le bagne avec le capitaine Talma qui nous pilote. Mme Sand s’attendrit, se demande, quand elle voit une physionomie pas trop mauvaise, si ce n’est pas un innocent « et puis, vraiment, il y a parfois, dit-elle, des expiations trop longues, et l’on devrait plus souvent réduire les peines et gracier. »

Le capitaine Talma, qui connaît bien le bagne et n’a pas, dit-il, de sensibleries, montre à Mme Sand, dans le magasin où l’on vend les objets fabriqués par les forçats, un grand « Monsieur » très digne, l’air fort distingué,