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grandes étendues de terre, à proportion des mains qui sont à l’ouvrage, ce qui peut seul compenser en quantité de produits la culture grossière suivie dans le désert. Si d’un autre côté, on donne la terre sans soin, avec profusion, il en résulte de grands maux d’une autre sorte. De vastes étendues deviennent la propriété d’individus, qui laissent leurs terres sans culture et intactes.

Des déserts sont ainsi interposés entre les colons industrieux ; les difficultés naturelles des communications sont grandement augmentées ; les habitants ne sont pas seulement épars sur une vaste étendue de pays, mais sont séparés entre eux par des eaux inguéables ; le cultivateur se trouve sans accès ou très éloigné d’un marché où il puisse disposer du surplus de ses produits et se procurer d’autres commodités ; et les plus grands obstacles existent à la coopération dans les travaux, à l’échange, à la division des emplois, à la combinaison pour des fins municipales ou autres, à la formation de villes, au culte public, à l’éducation régulière, à la diffusion des nouvelles, à l’acquisition des connaissances ordinaires, et même aux influences civilisatrices des simples réunions de plaisir. Monotone et stagnant en vérité doit toujours être l’état d’un peuple qui est permanemment condamné à une pareille séparation les uns des autres. Si de plus les terres d’un nouveau pays sont si négligemment arpentées, que les limites des propriétés soient inexactement ou insuffisamment définies, le gouvernement fait un amas de procès pour le peuple. Tout délai qui survient dans la confection des titres des individus aux terres aliénées par le gouvernement occasionne une égale insécurité et incertitude dans les propriétés. Si l’acquisition des terres en quelque quantité que ce soit est rendue difficile ou cause du trouble, ou est sujette à quelque incertitude ou délai inutile, les requérants s’irritent, l’établissement du pays est retardé, et l’immigration dans la colonie découragée, en même temps qu’on y excite l’émigration. Si des méthodes bien différentes de procéder ont effet dans la même colonie, ou dans différentes parties du même groupe de colonies, l’opération de quelques-unes ne peut manquer d’intervenir dans les opérations des autres et de les entraver ; de sorte que l’objet du gouvernement doit manquer quelque part ou en quelque temps. Et des changements fréquents de système suivront certainement beaucoup, non seulement en mécontentant probablement ceux qui obtiennent des terres immédiatement auparavant, ou qui désirent en obtenir immédiatement après chaque changement, mais aussi, en donnant un caractère d’irrégularité, d’incertitude, et même de mystère, au procédé le plus important du gouvernement. De cette manière l’établissement du pays et l’immi-