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incompatibilité avec les Institutions françaises de la province, et les membres influents de l’assemblée ne préparaient aucune mesure pour obtenir ce but désirable d’une manière moins subversive. On conserva la tenure féodale comme un moyen juste et facile de coloniser un nouveau pays ; l’assurance donnée par un comité de l’assemblée qu’on prendrait quelques mesures pour écarter quelques-uns des inconvénients les plus nuisibles de la tenure seigneuriale n’eût aucun résultat pratique ; et les entreprises des Anglais continuèrent d’être entravées par le système insuffisant et suranné des lois du pays. Dans les décisions de l’assemblée dans ses discussions, et dans les motifs apparents de sa conduite, les Anglais apercevaient l’indice du désir de prévenir l’émigration et les progrès de leur race. Une mesure, tendant à imposer une taxe sur les émigrés, quoique recommandée par le Gouvernement Impérial, et supportée de l’exemple des États voisins, qui donnent le plus grand encouragement à l’émigration, fut traitée dans l’assemblée d’après des motifs qui donnèrent justement lieu de soupçonner l’intention de fermer l’entrée à toute émigration Anglaise ci-après ; et l’industrie Anglaise fut ainsi arrêtée par cette conduite de l’assemblée. Quelques districts, particulièrement les Townships de l’Est où il n’y a pas de Français, souffrirent beaucoup du refus des améliorations nécessaires ; et les habitans d’origine anglaise regardèrent généralement la politique de l’assemblée comme un plan de prévenir l’émigration, d’arrêter les progrès de la richesse britannique, et de rendre précaires les propriétés qu’ils avaient déjà acquises dans le Bas-Canada.

L’assemblée, dont ils se plaignaient ainsi, et sur le compte de laquelle ils entretenaient de sérieuses appréhensions, était aussi en même temps en collision avec l’Exécutif. Le parti en pouvoir, et qui au moyen du Conseil Législatif tenait l’assemblée en échec, profita avec joie des mécontentemens de cette puissante et énergique minorité, pour lui offrir sa protection, et lui promettre l’obtention de ses vues. C’est ainsi que par des motifs et pour des objets bien différents se cimenta cette alliance étrange de la population anglaise et des officiels contre un ennemi commun. Les Anglais demandaient des réformes et des mesures libérales à l’assemblée, qui les leur refusait, tandis qu’elle demandait d’autres mesures libérales et d’autres réformes au Gouvernement Exécutif. L’assemblée se plaignait de l’usage oppressif du pouvoir de la part de l’Exécutif ; de leur côté les Anglais se plaignaient de ce qu’étant en minorité, la majorité française usait de son pouvoir pour les opprimer. Ainsi une démocratie entreprenante et éclairée était forcée, par son besoin de mesures libérales, joint à l’antipathie nationale, de faire cause commune avec un gouvernement qui était aux prises avec la majorité sur la question des droits populaires. La lutte a commencé par une