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Mais cette pauvre femme, qui avait de l’âge, dépérissait graduellement. Sa vue s’affaiblissait, son dos se courbait, ses jambes tremblaient. Cette année surtout, depuis la fin de l’été, après que les brises fraîches eurent annoncé l’automne, elle toussait, se plaignait, se traînait péniblement les pieds. Et la belle Octavie, inquiète et désolée, redoublait de soins, l’encourageait de ses paroles douces et de son rire clair. — « La santé va revenir, vous allez voir, disait-elle. Et plus vite que vous pensez ! Tenez, voilà pour votre rhume, le sirop de sucre et d’oignon. Voici votre tisane de sureau blanc et puis le remède du vieux docteur, qui va vous guérir, certainement »… Elle ne disait pas que pour payer cette potion célèbre elle avait tricoté en cachette une douzaine de paires de bas.

L’automne vint tout à fait, sapant la sève des plaines, arrachant les feuilles jaunies et jetant dans l’air les plaintes de son vent farouche. Tout était dépouillé, tout était nu et triste. La nature mourait lentement. Plus de ces jours tièdes qui mettent le cœur en joie, plus de ces après-midis heureuses et chaudes où tout rit, où tout chante sous le frémissement du soleil ;