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d’une table et mangeaient. Un autre, joufflu et rougeaud, dormait chaudement dans son « ber ». Un chat, couché en rond, sommeillait près du poêle. La grand’mère, une petite vieille, tremblante et marchant menue, apporta à Angèle un grand bol de lait, du pain et du sucre qu’elle dévora avec avidité. — « Vous vous rendez à pied à la Bonne Sainte-Anne ; c’est un vœu que vous avez fait, sans doute ? » questionna timidement l’aimable vieille. Angèle, qui mentait pour la première fois, répondit un faible « oui », et pour ne pas perdre plus de temps s’enfuit aussitôt sur la route.

Bientôt, enfin, elle reconnut, au loin, le clocher de l’église et les toits des maisons groupées autour. Tout cela se fondait, s’effaçait dans la brume du soir. Elle savait qu’il restait encore une bonne distance. Aurait-elle le temps de se rendre avant la nuit ? De plus, voilà que le vent s’élevait, dans une tourmente glaciale, et qu’il neigeait, qu’il neigeait à gros flocons. Elle voulut se hâter davantage, mais elle ne le pouvait plus car ses pieds lui faisaient trop mal. La neige tombait toujours. Transie jusqu’aux os, Angèle tremblait comme une feuille au vent. Après avoir