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chapeau sur des yeux éteints. Ses fondations sont de pierre brute ajustée au moyen d’un lourd ciment qui porte encore les marques de l’ancienne truelle. Une meule à manivelle, un puits à longue perche, une faucille noire et rouillée, toutes ces choses gisent là dans un délabrement complet. Les murs de bois moussu, aux lézardes nombreuses, abritent des nids d’hirondelles, qui y cachent leurs couvées. Un vieux four tombé en ruines rappelle ces jours anciens où chaque famille cuisait son pain. Et dans le jardin abandonné fourmillant d’herbes sauvages, une unique fleur résiste encore à la destruction, un beau myosotis dresse sa petite tête bleue et crie : « Ne m’oubliez pas » !

Cette maison m’impressionne. Il me semble que son vieux cœur va se réveiller, que ses paupières vont battre sous la force des souvenirs, et qu’elle va me parler comme à une amie. Elle va me parler du passé, de son passe vécu avec les êtres qui lui étaient chers. Et pourquoi ne parlerait-elle pas ? N’a-t-elle pas en elle des trésors, des beautés qui survivent, des ombres qui demeurent ? Où peut-on trouver plus de vie que dans une vieille maison ?…

Oui, cette vieille demeure me parle.