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camarades le même gîte, une petite maison de bois rond, bâtie par eux durant l’été précédent. C’était au pied du Mont Albert, dans la plus grande solitude, loin de toute habitation humaine. Ces deux hommes vivant ensemble la vie des bois, n’écoutaient pas d’autres bruits que l’écho des torrents sur les rocs et du vent sur les sommets. Ils n’entendaient pas d’autres cris que les cris du hibou, de la chouette, des orignaux et des loups. Ils connaissaient la forêt sur le bout de leurs doigts, et jamais ils ne s’étaient trompés de sentier pour revenir à la cabane où ils mangeaient et dormaient. Même ils ne craignaient pas d’entreprendre de longues courses à l’approche des mauvais temps. Ils ne dédaignaient pas non plus la rencontre des bêtes sauvages : leur fusil en avait vite raison. Ils ne redoutaient qu’une chose : le froid, le froid sournois qui endort sa victime et la couche pour le dernier sommeil. Voilà donc que, pour la première fois, ils s’étaient laissé surprendre, bien loin de leur toit, par une tempête et un froid terribles. Mais il leur restait la possibilité de se rendre au plus tôt à la première des maisons opposées, dont leur longue marche les avait grandement rapprochés.