Page:Lamy, Féron - Dans la terre promise, paru dans Le Soleil, Québec, du 21 nov au 17 déc 1929.pdf/150

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le mal était fait, il fallait en supporter les contrariétés et les souffrances ; il importait surtout de se tirer le mieux possible d’une mauvaise affaire.

VIII


Ce furent, fin septembre, les battages. Nouvelle déception : le blé rendit à une moyenne de 15 minots à l’acre. L’employé avait vu juste, la batteuse marqua un total de 2 000  minots. N’eût été le labour d’été qui rapporta 38 minots de l’acre, Placide Bernier tout compte fait, aurait été bien peu rémunéré de ses premiers labeurs de la ferme.

Sur les deux mille cinq cents minots de blé il fallait déduire la folle avoine qui entrait en compte avec un pourcentage de 15 minots par cent, c’est-à-dire environ 375 minots. À 55 sous du minot, et en déduisant la perte causée par la folle avoine, le blé rapportait environ onze cents dollars. Placide avait payé tous ses frais, y compris le salaire de son employé, avec l’argent qui lui restait en banque. Par bonheur l’avoine avait rendu mieux qu’on ne l’avait espéré : 2 500 minots sur 50 acres. En évaluant l’avoine à 30 sous, prix du marché cet automne-là, Placide Bernier ne retirait en argent de sa récolte qu’une somme d’environ 1 500 dollars, si l’on tient compte qu’il devait garder pour son usage au moins 1000 à 1 200 minots d’avoine.

Notre ami était loin de la fortune pour son premier essai. Qu’allait-il faire de son billet de 3,000 dollars en faveur de M. Moore ? Et comment allait-il vivre en attendant la récolte de l’année suivante ? Comment pourrait-il rencontrer tous les frais d’exploitation ? Et s’il venait à perdre des chevaux ?… S’il était nécessaire de renouveler quelques instruments aratoires toujours si coûteux ? Et les imprévus au cours d’une longue année… car les années sont longues à tirer pour