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reux de nous voir que si nous avions été de sa famille. Du coup, ma femme en oublia ses Indiens et leurs scalps : ce fonctionnaire — très bien appointé d’ailleurs — n’avait rien de la morgue de certains des nôtres.

« À la maison, nous trouvâmes une bonne grosse femme aussi réjouie que le surveillant, lequel nous la présenta familièrement comme étant sa « vieille » — non sans rire nous du plaisant de l’expression. Et nous voilà installés chez ces braves gens, à causer comme si nous nous étions toujours connus.

« Rien de plus agréable pour des émigrants sans feu ni lieu que de se voir accueillis amicalement sous un bon toit : aussi, notre reconnaissance était-elle grande ! Quoique âgés tous deux, nos hôtes, en vrais métis de bonne souche, avaient gardé la gaieté de leur jeunesse, et nous passâmes chez eux une de ces joyeuses soirées canadiennes que notre jeune cocher pour sa part ne dépara pas, car malgré son mutisme apparent, il avait des saillies originales.

« Il y a lieu de dire ici que le terme « métis » ne comporte pas au Canada la même acception méprisante qu’aux États-Unis. Loin d’être, comme dans la Californie, le Texas, l’Arkansas, etc., descendants d’aventuriers sans foi ni loi et pleins de tares, les Métis de l’Ouest proviennent pour la plupart d’unions régulières contractées jadis sur les bords de la Rivières Rouge entre les employés de la « Baie d’Hudson » (français et anglais) et des fillettes indiennes par devant les autorités civiles ou religieuses. Leur moralité est dans sa moyenne égale à celle des blancs, sinon supérieure en ce qui concerne le sentiment de l’honneur qu’ils disent tenir de leurs ancêtres grand-maternels, les Sioux, réputés « nobles » parmi les Indiens