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d’humidité suivi d’un excès de chaleur) l’averse, etc. s’abattant implacablement sur le travail de l’homme lequel devra mettre toute son énergie et son ingéniosité à tirer parti du peu qui lui aura été laissé.

« Certes, devant ces injustices du sort, le paysan n’est pas sans éprouver de révoltes, mais cependant contre qui s’insurger ? Faire une révolution et s’emparer de l’or des riches, cela ne le nourrirait pas au fond — peut-on vivre de métal ? D’autre part, aller piller des confrères plus heureux comme on a fait en Russie, la famine en résulterait infailliblement, personne ne voulant plus travailler. Quant à espérer faire partie de la petite bande de démagogues exploiteurs qui, un peu partout, vivent des bouleversements sociaux, c’est un leurre auquel son esprit avisé ne se laissera pas prendre. Résigné, il empoigne donc une fois de plus la charrue, jetant un regard vers ce ciel mystérieux d’où il attend inlassablement la subsistance, malgré tout !…

« Mais revenons à mon « américain » : pour être juste, je dois dire qu’il sema mon blé dans le temps convenu : cependant, ce ne fut pas sans avoir été obligé de le relancer et d’essuyer sa maussaderie ; toutefois, comme il tenait à se faire de la réputation dans le pays, il se montra assez correct cette première fois.

« Mais combien ses manières étaient différentes de celles des autres voisins, si réservés et ne se mêlant pas des affaires d’autrui ! Avec une jactance bien… française, hélas ! cet ex-canadien (car il l’était) pas plus tôt arrivé sur ma terre, se mit à faire des critiques de toutes sortes. Pensez donc, lui qui avait « voyagé » savait mieux que les habitants de l’Ouest ce qu’il fallait semer dans ce pays-là, et il trouvait, par exemple, que les fermiers ne mettaient pas assez de patates. « Chaque habitant, Monsieur, pontifia-t-il, doit en avoir deux gros