Page:Landormy - Brahms.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

autre artiste. En pareil cas, une certaine exaltation du sentiment est de rigueur. Soyons assurés que Brahms n’hésitera pas à user d’expressions exagérées ou même qui déplacent la vérité pour donner plus d’allure à son style, et en même temps pour complaire à son amie en fournissant un aliment à ce besoin confus de tendresse et d’idéal qu’elle a si souvent manifesté devant lui.

Malgré la netteté apparente de ses déclarations, je ne suis pas convaincu que Brahms ait surtout aimé d’amour cette Clara Schumann, pour laquelle il éprouva, sans aucun doute, l’affection la plus profonde de sa vie. Il me semble que cet homme si réservé, ce craintif et ce farouche indépendant n’eût jamais osé avouer un sentiment de cette nature, s’il l’avait ressenti vraiment dans toute sa violence. Il eût mis peut-être quelque pudeur aussi à briguer la place de son ami et protecteur vénéré dans le cœur d’une femme qu’il savait si fidèle à la mémoire du grand homme. Enfin, plus tard aurait-il aussi effrontément rapproché les noms de Robert et de Clara Schumann dans cette exclamation : « Toi et ton mari fûtes les plus belles expériences de ma vie, sa plus grande richesse, sa plus noble signification » ?