Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/159

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pas rebuter par la besogne à accomplir. D’autres, au contraire, sont nécessaires spécialement aux travailleurs qui ont à exécuter de certains travaux, ou qui travaillent dans de certaines conditions. Ainsi, il faudra de l’initiative et de la hardiesse à celui qui dirige une entreprise, et devant qui se présentent des occasions de s’engager dans des voies nouvelles ; il faudra du courage — au sens ordinaire du mot — à ceux qui sont chargés de telles besognes dangereuses. Et l’honnêteté sera utile chez tous ceux qui auront à accomplir des travaux sans être intéressés d’une manière sérieuse à la réussite ou à la bonne exécution de ces travaux.

De quoi donc dépendent ces qualités morales des travailleurs ? Même si nous ne recherchons que les causes générales, et si nous négligeons celles qui résident dans les caractères individuels, nous nous trouverons en présence d’un grand nombre de causes, qui agissent sur le développement, les unes de telle qualité, les autres de telle autre.

On a noté bien souvent l’influence du climat, sans d’ailleurs pouvoir déterminer au juste quelle importance il convient de lui attribuer. Il paraît bien certain que les climats chauds inclinent les hommes à la paresse. Mais on a pu faire observer que souvent dans un même pays on avait vu, d’une époque à l’autre, la population devenir travailleuse de paresseuse qu’elle était, ou inversement. L’influence de la race donne lieu aussi à bien des discussions. Il semble qu’au-dessus de ces deux influences il convienne de mettre celle du moment historique, comme Taine l’appelait : entendons par cette expression l’ensemble des croyances et des mœurs qu’on trouve dans un pays à une époque donnée, la direction générale de l’esprit public et de la civilisation, telle qu’elle résulte d’une foule de contingences historiques.

Il est important de noter, maintenant, que le travailleur apportera à son travail d’autant plus de courage et de soin qu’il sera intéressé davantage à bien faire. C’est ici d’ailleurs un point qui a été mis en lumière par beaucoup d’économistes. Et on a indiqué bien souvent les diverses causes qui font que le travailleur est plus ou moins intéressé à faire de bonne besogne. Il y a le régime politique et administratif, dont le bon fonctionnement est nécessaire pour permettre aux particuliers de s’engager dans des entreprises à long terme — ceci d’ailleurs nous ramène à ce « moment historique » dont nous parlions tantôt —. Il y a la situation juridique du travailleur dans l’entreprise, et le mode de rémunération de son travail : un travailleur libre, qui reçoit un salaire dont il peut disposer à son gré, qui peut sur son salaire faire des épargnes pour améliorer sa condition dans l’avenir, qui craint enfin, s’il ne donne pas satisfaction à son employeur, de perdre son gagne-pain, travaillera beaucoup plus et beaucoup mieux qu’un esclave ; un salarié qui participe aux bénéfices de son employeur travaillera mieux que celui qui reçoit un salaire fixe, tout au moins si la participation est assez sérieuse pour que le zèle de notre sa-