Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/184

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notre industriel dépense on salaires sont aussi des capitaux circulants. On mettra parmi les capitaux fixes, en revanche, les sacs ou les tonneaux dans lesquels on livre les marchandises produites, s’ils doivent faire plusieurs voyages, les outils des ouvriers, les machines, qui ont une durée beau coup plus longue, les bâtiments, etc.

On dit souvent que le progrès économique est caractérisé par une augmentation continue de l’importance des capitaux fixes. Il est certain que d’une manière absolue les capitaux fixes se développent. L’application plus étendue de méthodes productives déjà connues en fait employer de plus grandes quantités. Des productions nouvelles apparaissent, des procédés techniques sont introduits sans cesse qui ont ce même effet. Mais il s’agit ici de savoir comment varie le rapport de capitaux fixes aux capitaux circulants. Or nous voyons bien que les frais de main-d’œuvre, d’une façon générale, vont baissant relativement au capital fixe employé : les machines, notamment, remplacent de plus en plus la main-d’œuvre. Mais dans l’industrie, en même temps que le capital fixe s’accroît, la quantité des matières premières traitées s’accroît aussi, et il semble que parfois elle s’accroisse plus vite. Si bien qu’en définitive on ne doit tenir que pour probable cette assertion que nous avons dite[1].

Quand dans une exploitation le capital fixe, relativement à l’ensemble des capitaux engagés, est augmenté, il faut qu’il en résulte un accroissement de la production. Cette augmentation du capital fixe, en effet, a des inconvénients. D’une part, elle accroît la durée moyenne des avances capitalistiques de l’exploitation : et par là elle représente un sacrifice plus grand pour le capitaliste, comme le fera comprendre la théorie de l’intérêt que nous exposerons plus tard. De plus, une attente plus longue du pro duit que doivent donner les capitaux implique des risques plus grands, les prévisions que l’on peut faire au sujet du prix, par exemple, auquel ce produit se vendra étant d’autant plus incertaines qu’elles se rapportent à un avenir plus éloigné.

Au sujet des risques qu’entraîne l’emploi du capital fixe, on remarquera que ces risques peuvent être atténués par la possibilité qu’aura le capitaliste de détourner son capital fixe, en tout ou en partie, vers d’autres productions que celle à laquelle il était tout d’abord destiné. Cette possibilité n’existera pas toujours ; quand elle existe, elle atténue les risques dans

  1. On trouvera des indications statistiques, sur les points auxquels nous touchons ici, chez Mayo-Smith, Statistics and economics, chap. 5, pp. 165-172. Le Censu américain des manufactures de 1905 nous apprend qu’entre 1890 et 1905, dans l’ensemble des manufactures des États-Unis, le total des salaires payés est monté de 1.891 millions de dollars à 3.014, cependant que la valeur des matériaux employés passait de 5.162 millions à 9.497, et les « capitaux » employés de 6.525 à 13.872 millions (Publications du Bureau du Census, no 57, p. 13).