Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/193

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connu — peut s’accroître précisément parce que les ressources en terres vont diminuant — d’une façon absolue ou d’une façon relative —.

Mais n’a-t-on pas, pour le travail et la terre, une mesure physique[1] ? La quantité de travail dont la société dispose serait indiquée par le nombre des travailleurs, la quantité de terre par la superficie des terrains utilisables. Objecte-t-on qu’on ne saurait égaler un hectare de pâturage de montagne à un hectare de terre d’alluvion, ni le travail d’un manœuvre à celui d’un ouvrier d’art, d’un ingénieur, d’un chirurgien éminent ? Il est possible, est-il répondu, d’ôter à cette objection son fondement. Une étendue donnée de terre sera affectée d’un certain coefficient selon qu’elle sera, par exemple, plus ou moins fertile ; dans le travail il faudra considérer de même, en même temps que sa durée, l’habileté, le talent qu’il indique chez celui qui l’a fourni.

Toutefois, même avec cette complication la mesure physique du travail et de la terre demeure quelque chose de très grossier. Attachons-nous aux terres. Il suffirait sans doute d’en relever la superficie et d’en estimer la fertilité, si certaines hypothèses simples étaient réalisées, par exemple si chaque terre produisait toutes les denrées que les terres peuvent produire, et si le rapport de ce que donne chaque terre à ce que donnent les autres terres était le même pour toutes les denrées. Mais les faits ne sont pas conformes à de telles hypothèses, et il en résulte que la fertilité des terres n’est point quelque chose de fixe, d’absolu. Telle terre est tenue pour fertile qui ne peut donner qu’une seule denrée, parce que dans le système présent de la production on trouve avantage à lui faire produire cette denrée ; mais avec un agencement différent des moyens productifs, on serait amené peut-être à produire la denrée en question, ailleurs, en plus grande quantité : et si la culture de notre terre cessait par là d’être avantageuse, pourrait-on la dire encore fertile[2] ?

Cependant, malgré les observations qu’on vient de voir, la mesure physique du travail et de la terre reste la meilleure ; et c’est d’elle que nous nous servirons.

102. Hypothèse d’un savoir stationnaire. — Revenons donc à la question que nous posions tantôt. Pour répondre à cette question, nous nous placerons tout d’abord dans l’hypothèse d’un savoir qui demeurerait stationnaire.

1o Les ressources de l’humanité en terre s’accroissent, au point de vue de la quantité proprement dite, par l’occupation et la mise en valeur de terri-

  1. Effertz s’est prononcé en faveur de cette mesure. C’est afin de pouvoir résoudre le problème de la « productivité », c’est-à-dire déterminer ce que veut l’intérêt social dans la production.
  2. Il y a d’excellentes remarques, sur la notion de la fertilité du sol, chez Marshall, Principles, liv. IV, chap. 3, §§ 3-4 (trad. fr., t. I).