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ouvriers sociétaires sont la minorité, et que les ouvriers sociétaires ne possèdent qu’une petite part du capital, celui-ci appartenant pour la plus grande partie à des personnes étrangères, ou à des coopératives de con sommation.

C’est en France que la coopération de production s’est le plus développée. Il y a eu une première poussée en 1848, résultat de la propagande doctrinale de certains écrivains socialistes. Il y en a eu une seconde entre 1863 et 1866. Puis de nouveau dans l’époque contemporaine des entre prises coopératives se sont fondées. En 1897, on en comptait 250 avec 12.000 ouvriers associés, vendant pour 40 millions de produits et procurant à leurs membres un gain annuel moyen de 1.625 francs. En 1903, il y en avait 335, avec un chiffre de ventes, croit-on, de 60 millions. La Verrerie ouvrière d’Albi, fondée en 1896, occupait cette même année 350 ouvriers et vendait pour 774.000 francs de bouteilles.

Ces chiffres, en somme, ne représentent rien de très considérable, sur tout si l’on tient compte de ce fait que les coopératives de production ont bénéficié de la bienveillance des pouvoirs publics, de la générosité de certains philanthropes, et de l’appui de certaines coopératives de production. L’importance de l’entreprise coopérative va croissant ; cette entreprise ce pendant ne constitue, et ne constituera de longtemps, que l’exception.

V. La spécialisation des entreprises[1]

133. Conditions particulières de l’agriculture. — Jusqu’où la spécialisation des entreprises est-elle poussée, dans l’économie contemporaine ? Si l’on veut répondre à cette question, il est nécessaire de mettre à part l’agriculture, laquelle se trouve ici dans des conditions tout à fait particulières.

Dans l’agriculture, la considération qui prime tout, peut-on dire, est celle de la nature de la terre qu’il s’agit de mettre en valeur. On veut exploiter une terre ? pour déterminer quel emploi on en fera, il faut se préoccuper de diverses choses, comme de l’abondance ou de la rareté, du bas prix ou du haut prix de la main-d’œuvre qu’on pourra se procurer, et de la proximité plus ou moins grande d’un marché où l’on pourra écouler à un prix avantageux telles ou telles sortes de produits. Mais on s’inquiétera tout d’abord de savoir quel produits la terre en question peut donner, en quelles quantités, et moyennant quels travaux. Les considérations in

  1. Voir Hobson, Evolution of modern capitalism, chap. 6, §§ 1-3, Bourguin, Les systèmes socialistes, chap. 11, I, pp. 136-140 ; cf. encore Sombart, Der moderne Kapitalismus, t. I, chap. 25.