Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/253

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très poussée. Et dans beaucoup de branches de l’industrie cette spécialisation va augmentant. Certaines filatures anglaises de coton, par exemple, en sont venues à limiter leur production à un petit nombre de numéros.

Toutefois, la tendance à la spécialisation se trouve contrariée, dans certains cas, par une tendance opposée à l’intégration. Cette tendance à l’intégration se manifeste de deux façons différentes, qu’il importe de distinguer avec soin.

1o Une première espèce d’intégration d’entreprises est celle que l’on constate quand un entrepreneur, au lieu d’acheter à d’autres entrepreneurs tels articles, tels services qui lui sont nécessaires pour la production à laquelle il s’est consacré, organise dans son propre établissement la fabrication de ces articles ou la production de ces services. Notre entrepreneur, de la sorte, vendra les mêmes marchandises qu’il vendait antérieurement ; mais il fera lui-même, à son compte, une plus grande partie de ces opérations productives qu’exige, au total, la production de ces marchandises.

Les exemples de ce processus particulier d’intégration sont aisés à trouver. Sombart, entre autres, en donne une longue série. La maison Krupp a une imprimerie avec onze presses et un atelier de reliure ; la fabrique de chocolat Stollwerk a également une imprimerie avec 6 presses à marche rapide et un atelier de reliure. Il y a des ateliers de tonnellerie dans quantité d’entreprises employant des tonneaux : raffineries de pétrole, fabriques de ciment, usines de produits chimiques, distilleries d’alcool, brasseries, etc. Dans les entreprises qui emploient des machines, on voit souvent des forgerons ; certaines fabriquent même une partie tout au moins de leurs machines. Les fabriques de papier achètent des établissements de défibrage du bois ; etc.

On remarquera que c’est dans la grande industrie que le phénomène qui nous occupe se rencontre. Ce n’est que là qu’il peut avoir lieu. Et il résulte, comme il est facile de s’en rendre compte, de la concentration des capitaux. Supposons un industriel qui entreprend de produire un certain article, et qui dispose d’un certain capital ; notre industriel, s’il se limite à une opération productive déterminée — la dernière par exemple, celle qui rendra la marchandise propre à la consommation —, aura juste assez de capital pour organiser son entreprise selon le modèle plus productif : dans ces conditions, il lui sera plus avantageux sans doute de se borner, en effet, à l’opération productive en question, et de laisser d’autres entrepreneurs se charger des opérations préalables, que de vouloir faire dans son établissement plusieurs des opérations qu’exige la production de son article.

Prenons, maintenant, un industriel qui dispose d’un capital très considérable, soit par exemple 3 millions. Cet industriel veut, nous supposerons, fabriquer du chocolat. S’il achète les machines qui lui sont nécessaires,