Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/336

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En France, le nombre des travailleurs isolés de l’industrie était estimé pour 1890 à 1.565.000, dont 703.000 patrons. Le recensement des professions fait dans cette même année indique, pour ces industries où ils sont particulièrement nombreux, 928.000 petits patrons travaillant seuls et ouvriers à façon ; là-dessus, il y en aurait eu 516.547 dans la confection et la lingerie, 84.390 dans la cordonnerie, 81.790 dans les industries textiles autres que celle de la soie, 48.138 dans la dentelle, etc., 43.578 dans l’industrie de la soie, 34.483 dans les chapeaux, fleurs et plumes, etc. On remarquera que parmi les patrons englobés dans ces nombres, si beaucoup sont de simples façonniers, beaucoup aussi sont vraiment indépendants ; et d’autre part ces nombres ne comprennent pas les ouvriers de l’industrie à domicile qui sont groupés dans des ateliers.

En Belgique, le personnel de l’industrie à domicile serait descendu de 200.000 travailleurs en 1846 à 118.000 en 1896, mais seulement par suite de la disparition des Rieurs à la main. Il représenterait encore 17 % de la population ouvrière totale. En Angleterre, aux États-Unis, l’industrie à domicile occupe de nombreux ouvriers, surtout dans les grandes agglomérations, et pour le travail de la confection.

Les origines de l’industrie à domicile sont diverses. Ici elle est sortie de la production de famille des paysans : des entrepreneurs se sont trouvés qui ont acheté aux petits cultivateurs ces produits industriels qu’ils fabriquaient, en partie pour leur consommation propre, en partie pour le marché, qui les ont amenés à s’adonner davantage à ces travaux industriels, qui au besoin leur ont appris à modifier leur technique pour l’accommoder à la demande de telle ou telle clientèle. Ailleurs, l’industrie à domicile apparaît comme une dégénérescence du métier : l’artisan indépendant, voyant pour une raison ou pour une autre sa condition empirer, a accepté de travailler pour un grand entrepreneur. Parfois même l’industrie à domicile est née de la transformation d’entreprises qui antérieurement étaient organisées dans la forme de la fabrique.

On aperçoit aisément les avantages qu’un entrepreneur trouve à occuper des ouvriers qui travaillent à domicile. Il s’épargne ainsi ces dépenses con sidérables que représenterait la location et l’aménagement, ou encore la construction de bâtiments pour installer ses ouvriers. D’autre part, n’ayant point — c’est ainsi du moins que les choses se passent d’ordinaire — de matériel à lui, il peut à sa guise quitter une production qui a cessé d’être lucrative et en entreprendre une autre. Mais surtout il réalise des économies sur les salaires. Il peut chercher sa main-d’œuvre chez des paysans, des ouvriers des industries saisonnières qui à de certaines époques de l’année sont inoccupés, chez des femmes que leurs enfants retiennent chez elles et qui disposent d’un peu de temps : toutes personnes qui sont prêtes à travailler même pour une rémunération très basse. Ceux-là de ses ouvriers