Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/38

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Cependant que l’école classique, d’une part, s’enfermait dans la pratique de plus en plus exclusive de la méthode dite déductive, d’autre part, inclinait toujours davantage — d’une manière générale — vers un libéralisme absolu qui ne répondait plus aux aspirations ni aux besoins du temps, d’autres écoles se formaient.

List, dans son Système national d’économie politique (1841), opposait aux tendances cosmopolites de l’école classique, à cette thèse, du moins, des classiques que les intérêts des diverses nations étaient concordants, une affirmation contraire. Il montrait que chaque nation a son économie propre, différente par ses caractères des économies des nations voisines, séparée de celles-ci dans une très grande mesure, et qu’elle avait aussi ses intérêts distincts. En même temps, il insistait sur la nécessité de procéder dans l’économique à des études historiques et descriptives. Nationaliste d’un côté, historien de l’autre, il indiquait la voie où la plupart des économistes allemands devaient s’engager après lui.

Il faut noter aussi l’apparition d’une économique socialiste. Les commencements s’en trouveraient chez des auteurs comme Sismondi. Celui-ci, dans ses Nouveaux principes d’économie politique (1819), avait accusé le régime économique contemporain, non seulement de meurtrir les prolétaires, mais de permettre aux activités économiques individuelles de se déployer, souvent, dans un sens contraire aux intérêts de la collectivité. Cette idée si féconde de Sismondi, toutefois, ne devait recevoir qu’à la fin du xixe siècle les développements qu’elle comporte. C’est dans une autre direction que Rodbertus, vers 1850, et Marx un peu plus tard devaient aller chercher le principe d’une interprétation nouvelle de l’économie moderne, interprétation qui constitue aujourd’hui la base « scientifique » du socialisme[1].

Les auteurs que nous avons cités jusqu’à présent sont des auteurs qui, pour la plupart, ont joui tout de suite d’une grande réputation et qui ont exercé une grande influence sur leur temps. Mais il y en a eu d’autres, vers le milieu du xixe siècle, qui, méconnus de leur vivant, n’en ont pas moins apporté des contributions notables à l’économique, et auxquels on rend justice maintenant. Raë, dans ses New principles of political economy (1834)[2], a projeté de vives lueurs sur la question du rôle du capital dans la production, et sur celle des conditions qui entravent ou qui favorisent le développement du caractère capitalistique de l’économie. Cournot, Dupuit, Gossen ont appliqué les mathématiques à l’économie. Cournot a

  1. Rodbertus, Sociale Briefe an v. Kirchmann, 1850-1851 ; Karl Marx, Das Kapital, liv. I, 1867 (trad. fr., Paris, librairie du Progrès).
  2. L’ouvrage a été réimprimé à New-York, en 1905 (chez Macmillan), avec une distribution nouvelle du texte, et sous le titre nouveau de Sociological theory of capital.