Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/62

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ments, elles se font comprendre aisément de tous. Il vaudra donc toujours mieux, lorsque cela par ailleurs ne présentera pas d’inconvénient sérieux, éviter de parler le langage de l’algèbre ou de la géométrie.

Mais il faut surtout s’attacher à la nature des questions traitées. Dans beaucoup de questions économiques, l’emploi du langage mathématique peut offrir de grands avantages. Ce langage est plus concis : il permet d’exprimer avec quelques signes ce que le langage courant ne pourrait dire qu’avec des longueurs fâcheuses. Il est plus clair également — et c’est en partie parce qu’il est plus rapide, en partie aussi parce que les signes mathématiques font apparaître mieux les relations quantitatives des réalités qu’ils expriment —. Il permet mieux que le langage courant d’éviter certaines erreurs, ces erreurs principalement qui résultent de la confusion de la pensée. Et il peut enfin suggérer des recherches, des développements dont sans lui on aurait moins facilement l’idée[1].

Toutefois, il arrive aussi que l’emploi du langage mathématique n’offre point ces avantages ; on s’est servi des mathématiques plus d’une fois pour établir péniblement des vérités que l’observation familière, que le raisonnement familier nous faisaient atteindre tout de suite et sans difficulté aucune. Et les excès de l’économique mathématique — excès qui s’expliquent par le parti pris, par une vue point tout à fait exacte de la valeur de cette « méthode mathématique », et quelquefois par un peu de pédantisme — ne sont pas sans avoir contribué à inspirer à beaucoup de gens de l’aversion pour des procédés de recherche qui, souvent, sont utiles.

En nous expliquant sur l’économique mathématique, nous avons dû parler de l’économique géométrique. Cette dernière expression, toutefois, est prise dans deux sens différents, qu’il importe de distinguer.

1o L’économique géométrique, au sens ordinaire de l’expression, est une des branches de l’économique mathématique : car le langage géométrique est une des variétés du langage mathématique. On peut se servir des figures géométriques pour faire apparaître des relations nécessaires entre les phénomènes économiques ; et certains auteurs, Marshall en particulier, se sont servis plus volontiers de ce procédé que de tout autre[2]. Cette figuration

  1. Tout ceci a été indiqué excellemment par Cournot. « L’emploi des signes mathématiques, dit Cournot dans ses Principes mathématiques (Préface, pp. viii-ix), est chose naturelle toutes les fois qu’il s’agit de discuter des relations entre des grandeurs ; et lors même qu’ils ne seraient pas rigoureusement nécessaires, s’ils peuvent faciliter l’exposition, la rendre plus concise, mettre sur la voie de développements plus étendus, prévenir les écarts d’une vague argumentation, il serait peu philosophique de les rebuter parce qu’ils ne sont pas également familiers à tous les lecteurs et qu’on s’en est quelquefois servi à faux. »
  2. Il convient de recommander ici le petit livre de Cunynghame, A geometrical political economy où sont réunies, notamment, les expositions géométriques de Marshall.