Page:Landry, Principes de morale rationnelle, 1906.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Socrate, Platon, Leibnitz n’ont reconnu de liberté à l’homme que la « liberté de perfection » ; pour eux, l’homme n’est libre qu’autant que son activité est dirigée vers des fins bonnes, et il est d’autant plus libre qu’il s’approche davantage de la perfection. Mais ces mêmes philosophes déclarent, en outre, que l’homme fait nécessairement ce que sa raison lui représente comme le meilleur, que jamais il ne préfère sciemment le mal au bien. Par là ils se mettent en contradiction avec les faits, lesquels nous apprennent que nos actions ne sont pas toujours conformes à ce que notre raison nous recommande. C’est que leur théorie de la liberté ne procède pas de l’observation ; elle procède de cette idée à priori que nos actions sont déterminées uniquement par nos représentations, par des causes d’ordre intellectuel. Ils ont déduit la liberté au lieu de la constater : et cette méthode les a conduits à des affirmations erronées.

Mentionnerai-je encore la théorie de Kant ? Cette théorie est suffisamment connue. Kant estime que la liberté ne saurait être démontrée par la raison spéculative, que la notion de liberté, en outre, est incompatible avec les conditions de l’expérience : dans le monde des phénomènes, il n’y a pour la liberté aucune place. Cette liberté cependant, il la restaure — comme attribut du noumène, il est vrai — grâce à la considération des principes à priori de la raison pratique. C’est qu’en effet la raison pratique nous révèle l’existence du devoir, qu’elle nous présente comme absolu, inconditionnel ; elle nous dicte un impératif catégorique, et le fait qu’un tel impératif soit possible, que la raison pure puisse être pratique prouve que la volonté est libre.