Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/122

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comparer à son devancier français ; car, dès le début, il prit parti pour l’école rationaliste en médecine. Plus sérieux et plus solide que De la Mettrie, il appliqua ensuite son talent riche et multiple soit à des recherches scientifiques, soit à la vulgarisation, par la parole et par les écrits, des résultats acquis de nos jours par les sciences physiques. Dans tout le cours de son activité, il ne perdit jamais de vue les rapports de ses études avec les grands problèmes que l’humanité, dans sa marche progressive, a le devoir de résoudre.

Encore que Büchner, influencé par Moleschott, dont il imita la manière emphatique et le style déclamatoire, ait professé un matérialisme accentué ; sa tendance réelle, — autant qu’on peut en juger d’après des passages, plus ou moins contradictoires, de ses écrits, — n’en est pas moins relativiste (56). Les énigmes finales de la vie et de l’existence sont, dit-il à plusieurs reprises, tout à fait insolubles (57). Quant aux recherches empiriques, qui seules peuvent nous conduire à la vérité, elles ne nous permettent d’admettre rien de suprasensible. Si notre pensée franchit les limites de l’expérience, nous tombons sans retour dans des erreurs. La foi, qui dès lors n’a plus rien à démêler avec les faits, peut aller s’égarer dans ces régions-là ; mais la raison ne peut ni ne doit l’y suivre. La philosophie doit être le résultat des sciences physiques ; nous devons nous contenter de ce qu’elles nous enseignent, tant que par cette voie nous ne sommes pas arrivés à une vue plus profonde. — Il est à remarquer que Büchner ne veut pas admettre l’importance poétique et symbolique des thèses philosophiques ou religieuses. En ce qui concerne ces questions, il a rompu avec ses tendances poétiques ; et, dès ce moment, il ne connaît que le vrai ou le faux. Il nie ainsi au fond la spéculation, la foi religieuse et même toute poésie qui exprime une pensée en style imagé.

Moleschott et Büchner font souvent preuve d’une sagacité grande et véritablement philosophique dans l’élucidation de