Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/189

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Quand les bases exactes d’une science sont posées, on trouve sans doute une masse de conséquences spontanément et avec des efforts d’esprit relativement très-faibles : il est plus facile de sonner une cloche que de la fondre. Mais, lorsque l’on fait en avant un pas très-important dans la voie des principes, on est presque toujours témoin du même spectacle une idée nouvelle se fait place en dépit du préjugé, quelquefois même à l’aide de ce préjugé. C’est seulement en s’épanouissant qu’elle brise ses enveloppes pourries. Quand cette idée n’existe pas et par conséquent ne peut s’épanouir, on ne gagne rien à éliminer le préjugé. Au moyen âge, bien des personnes étaient exemptes des préjugés astrologiques à toutes les époques, on trouve des traces de l’opposition ecclésiastique et laïque à cette superstition ; malgré cela, c’est de l’astrologie seule que sortirent les progrès de l’astronomie.

Le résultat le plus important des études historiques est la placidité académique avec laquelle on accueille nos hypothèses et nos théories telles qu’elles sont, sans hostilité et sans foi, comme des degrés sur la voie infinie qui nous rapproche de la vérité, but probable de notre développement intellectuel. Il est vrai qu’ainsi se trouve complètement supprimé tout matérialisme, en tant que présupposant la croyance à l’existence transcendante de la matière. En ce qui concerne le progrès des sciences positives, les plus nombreuses découvertes ne seront certainement pas faites par celui qui méprise la théorie d’hier et ne jure que par celle d’aujourd’hui, mais par celui qui, dans toutes les théories, ne voit que le moyen de se rapprocher de la vérité, d’obtenir une vue d’ensemble des faits, et d’en disposer pour les utiliser.

Même en refusant de croire aux théories comme à des dogmes, on n’en a pas moins le droit de les mettre à profit. D’un autre côté, on s’éloignerait également de la bonne voie, si l’on voulait étouffer, dès leur naissance, toutes les idées