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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/241

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la matière en soi est donc pour nous calme et inactive nous distinguons en elle la division dans l’espace et la quantité ou masse, que l’on admet comme éternellement immuable. Nous ne pouvons attribuer à la matière en soi de différences qualitatives ; car, si nous parlons de matières hétérogènes, nous ne plaçons jamais leurs différences que dans les différences de leur action, c’est-à-dire dans leurs forces. Aussi la matière en soi ne peut-elle subir d’autre changement que dans l’espace, c’est-à-dire le mouvement. Mais les objets de la nature ne sont pas inactifs ; nous ne pouvons même les connaître que par l’action qu’ils produisent sur les organes de nos sens ; alors, d’après l’action, nous concluons à l’existence de ce qui la produit. Si donc nous voulons réellement employer l’idée de matière, nous ne pouvons le faire qu’en ajoutant par une deuxième abstraction » (ou plutôt par une fiction nécessaire, par une personnification apparaissant en vertu d’une contrainte psychique), « qu’en ajoutant à la matière ce dont nous voulions faire abstraction auparavant, savoir la faculté d’agir, c’est-à-dire que nous lui attribuons des forces. Il est évident que les idées de matière et de force, appliquées à la nature, ne peuvent jamais être séparées. Une matière pure serait indifférente pour le reste de la nature, parce qu’elle ne pourrait jamais déterminer un changement ni dans cette nature ni dans les organes de nos sens ; une force pure serait quelque chose qui devrait exister quelque part et pourtant ne pas exister, parce que nous appelons matière ce qui existe quelque part. C’est encore se tromper que de déclarer la matière quelque chose de réel, tandis que la force ne serait qu’une simple idée, à laquelle rien de réel ne correspondrait ; toutes deux sont plutôt des abstractions de la réalité, formées d’une manière identique ; nous ne pouvons en effet percevoir la matière que par ses forces, jamais en elle-même » (39).

Ueberweg, qui aimait à faire connaître ses opinions divergentes par des notes marginales, a écrit avec beaucoup de