Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/342

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d’hui, chez des peuples sauvages, nous voyons employés des instruments en pierre et en coquillages de toute espèce, quoique ces mêmes sauvages possèdent souvent des outils métalliques importés par des Européens. — Ainsi, tout en nous félicitant des nombreux renseignements que nous fournissent notamment les constructions lacustres pour l’histoire des industries les plus anciennes, de la manière de vivre et de la culture graduellement croissante des peuplades préhistoriques, nous n’y trouvons rien qui puisse nous éclairer sur ce qui différencia plus nettement d’abord l’homme d’avec les espèces animales, et par conséquent sur les véritables commencements de l’existence de l’homme en tant qu’espèce.

Un détail cependant mérite d’être mis en relief, car il paraît se rapporter essentiellement aux premiers commencements de la vie de l’homme en tant qu’espèce distincte c’est l’apparition du sentiment du beau et de certaines ébauches artistiques à des époques où évidemment l’homme était encore en lutte sauvage avec les grands carnassiers et maintenait péniblement son existence au milieu des terreurs et des péripéties les plus émouvantes. Mentionnons en première ligne les esquisses d’animaux sur des pierres ou sur des os, que l’on a trouvées, pour la première fois, dans des cavernes du midi de la France, et tout récemment à Thaingen, près de Schaffhouse. Ajoutons que, dans les débris les plus anciens elles plus grossiers de poterie, on remarque presque toujours une certaine recherche de l’élégance de la forme ; bref, les éléments de l’ornementation semblent presque aussi anciens que l’habileté déployée dans la fabrication des armes et des ustensiles en général (15). Nous avons ici une confirmation remarquable des pensées exprimées par Schiller dans ses Artistes ; en effet, quand nous nous représentons les passions violentes de l’homme primitif, nous ne pouvons guère leur opposer d’autres influences éducatrices et ennoblissant es que la société et le sentiment du beau. On se rap-