Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/344

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dans son invention, une base pour la formation de l’idée, opération dont les éléments ne sont nullement inconnus aux animaux. Les sons qui, par leur nature réflective, expriment l’étonnement, la terreur, etc., ont dû toujours être compris de tous les êtres semblablement organisés ; car, même chez les animaux, ils constituent des moyens indubitables de se comprendre. Nous avons un élément représentant ici subjectivement, là objectivement la formation du langage. La réunion des deux a donné nécessairement au subjectif des formes plus rigoureuses ; à l’objectif, plus de contenu (17).

Si l’on étudie l’histoire de la culture humaine à la lumière des recherches les plus récentes, on est amené par la marche des résultats acquis à se figurer une hyperbole dont les ordonnées, représentant le développement de la culture, s’élèvent d’abord avec une lenteur extrême sur les abscisses énormes du temps ; le mouvement d’ascension devient de plus en plus rapide ; enfin se manifeste, dans un temps relativement très-court, un progrès immense. Nous employons cette image pour rendre parfaitement claire une idée qui nous paraît avoir de l’importance. Il en est, à vrai dire, tout autrement du développement des qualités physiques et même des qualités psychiques des peuples. Ici le progrès des aptitudes des individus et des nations paraît être d’une lenteur extrême et presque insensible. Cela résulte de ce que, de deux hommes doués d’une égale capacité, celui qui se trouve dans un milieu avancé s’élèvera bien plus haut que celui qui grandit dans un milieu grossier. Il semble presque qu’il suffit d’être très-médiocrement doué pour se familiariser, durant les vingt années de l’enfance et de la jeunesse, avec toutes les parties de la culture la plus développée, au point de prendre soi-même une part active au mouvement général. Mais si l’on songe que, dans les siècles précédents, on ne se transmettait guère que des faits, des expériences isolées ou des pro-