Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/421

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trouvait, par exemple, des créatures qui sentent ou goûtent la lumière (c’est-à-dire la perçoivent par des organes semblables à nos organes de l’odorat et du goût), ou qui reçoivent des images visuelles par une source de chaleur obscure pour nous, la théorie de la formation du monde des sens par le sujet recevrait ainsi une nouvelle confirmation ; si, par contre, il était démontré que dans toute la diversité du monde animal il n’y a probablement pas de sensations essentiellement différentes des nôtres, cette découverte tournerait provisoirement à l’avantage du matérialisme (46).

Un précieux contingent pour les fondements d’une psychologie future se trouve en outre indubitablement dans les expériences systématiques faites récemment sur des nouveau-nés. Si l’on veut saisir le mécanisme des phénomènes psychiques, il faut avant tout, tâcher d’observer les premiers et plus simples éléments de ce mécanisme. Nos bons philosophes raisonnent sur l’origine de la conscience avec un flegme vraiment incroyable, sans jamais éprouver le besoin d’aller une fois dans la chambre des enfants et d’y étudier ce qui peut s’y passer de relatif à ce problème. Mais tant que les mots se prêteront patiemment à l’expression d’un système ; tant que les étudiants transcriront patiemment ce système sous la dictée du maître ; tant que les éditeurs le feront patiemment imprimer et que le public attachera un grand prix au contenu de ces livres, le philosophe ne verra aucun motif pour aller plus loin. Vient ensuite le physiologiste (47), qui donne à goûter aux nouveau-nés une solution de sucre ou de quinquina ; il approche d’eux une lumière ou produit un bruit à proximité de leurs oreilles, en notant avec soin tous les mouvements, toutes les contractions de muscles, etc., qu’il a observés. Il combine les observations qu’il a faites sur des enfants nés avant terme et sur des enfants nés à terme, remarque soigneusement les différences, et compare le tout aux résultats obtenus par l’anatomie et la pathologie. Il s’efforce enfin de