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conseil municipal est une réunion d’escrocs et d’imbéciles, dont nous demandons qu’on nous débarrasse ; comme si ces escrocs et ces imbéciles n’étaient pas nos représentants, comme s’ils ne devaient pas passer aux yeux des étrangers, pour la quintessence de notre intelligence et de notre honnêteté, comme s’ils n’étaient pas choisis par nous, comme s’il ne dépendait pas de nous et uniquement de nous, de les nommer plus intègres et plus intelligents. Nos lamentations continuelles ne sont-elles pas un continuel aveu de notre impuissance à nous gouverner nous-mêmes ? N’est-il pas temps qu’elles cessent, que nous examinions notre situation, que nous nous demandions si elle est aussi mauvaise que nous l’avons cru et que nous l’avons dit, que nous en recherchions la cause, que nous voyions si nous sommes moins capables de gérer nos affaires que les citoyens, je ne dis pas de Montréal, mais du dernier village de l’Amérique du Nord, et si notre intelligence est tellement faible, qu’il faille nous interdire et nous mettre en curatelle ?

Après avoir, comme bien d’autres, déploré le mauvais état de nos affaires municipales sans en rien connaître, après l’avoir attribué, comme tout le monde, à la maladresse et à la négligence de ceux qui les administrent, après avoir même appelé de mes vœux, le remplacement du conseil électif que nous avons, par des commissaires nommés par le gouvernement, je me suis enfin posé les questions qui précèdent : j’ai étudié notre système municipal, j’en ai examiné le fonctionnement, je me suis demandé si nous avions beaucoup à gagner, à voir substituer à une administration qui nous doit rendre compte de tous ses actes, une administration sur laquelle nous n’aurions aucun contrôle. Et j’en suis venu à la conclusion que notre situation, sans être brillante, n’est pas désespérée, que notre administration municipale n’est pas plus mauvaise que celle de Montréal, et que mettre des commissaires à la place de notre conseil, ce serait, non pas faire cesser les maux dont nous nous plaignons, mais nous fermer les yeux sur eux ; ce serait faire comme l’autruche qui, croyant que le chasseur