Page:Langevin - La Pensée et l'action, 1950.djvu/346

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prévoir et d'alléger la peine des hommes, de dominer les forces naturelles en se conformant à leurs lois. La liberté de chacun conditionnant celle des autres, une société est donc d'autant plus libre que chacun de ses membres est plus conscient, plus cultivé et plus instruit. Nous rejoignons ici l'aspect philosophique du problème de la liberté. Mon but, aujourd'hui, n'est pas d'y insister. Je veux seulement rap-peler qu'à travers la croyance grecque à l'inéluctable destin, en passant par les idées des stoïciens, de Baruch Spinoza, par le déterminisme absolu de notre XVIIIème siècle, s'est dégagée la formule : « La liberté augmente avec la conscience de la nécessité. » Bien qu'elle souligne la liaison étroite et profonde entre la science et la liberté, et traduise cette grande leçon que, dans le monde matériel comme dans le monde moral, on ne peut dominer la nature qu'en se conformant à ses lois, cette formule implique la contradiction entre liberté et nécessité, autour de laquelle tourne depuis des millénaires le vieux problème de la liberté. D'un côté l'existence des lois naturelles et la doctrine du déterminisme absolu qu'elles ont suggéré avec pour conséquence, le fatalisme d'un destin préétabli, de l'autre les évidentes possibilités de l'action qui permettent à l'homme de transformer le monde et de se modifier lui-même. Je dirai seulement que la synthèse nécessaire pour surmonter cette contradiction nous apparaît plus proche depuis que la physique moderne a pénétré dans le monde atomique et y a été