Page:Langlois - Collection des historiens anciens et modernes de l’Arménie ; Première période, tome 2, 1869.djvu/84

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

casque de fer à la crinière flottante, une cuirasse d’airain qui lui garantissait le dos et la poitrine, des cuissards et des brassards ; au côté gauche et fixée à la ceinture une épée à double tranchant ; de la main droite, il portait une bonne lance et de la gauche un épais bouclier. À sa droite et à sa gauche se tenaient ses troupes d’élite. Haïk, voyant le Titan ainsi armé de toutes pièces, et flanqué des deux côtés d’une escorte choisie, place Armenag avec ses deux frères à sa droite, Gatmos et deux autres de ses fils à sa gauche, parce qu’ils étaient habiles à tirer l’arc et à manier l’épée ; pour lui, se plaçant à l’avant-garde, il forma derrière lui en triangle ses autres troupes qu’il fit avancer doucement.

S’étant rapprochés de tous côtés les uns sur les autres, les géants, dans leur choc impétueux, faisaient retentir la terre d’un bruit épouvantable, et par la fureur de leurs attaques ils répandaient parmi eux la terreur et l’épouvante. Grand nombre de robustes géants, de part et d’autre, atteints par le glaive, tombaient renversés à terre ; cependant des deux côtés la bataille restait indécise. À la vue d’une résistance aussi inattendue et pleine de dangers, le roi effrayé remonte sur la colline d’où il était descendu, car il croyait trouver un abri sûr au milieu des siens, jusqu’à ce qu’enfin, toute l’armée étant arrivée, il put recommencer l’attaque sur toute la ligne. Haïg, l’habile tireur d’arc, comprenant cette manœuvre, se place en face du roi, bande son arc à la large courbure, décoche une flèche munie de trois ailes, droit à la poitrine de Bélus, et le trait, le traversant de part en part, sort par le dos, et il tombe à terre. C’est ainsi que le fier Titan, abattu et renversé, expire. Ses troupes, à la vue de ce terrible exploit, prennent la fuite, sans qu’aucun se retournât en arrière. » Mais assez sur ce sujet.

Haïk couvre de constructions le champ de bataille et lui donne le nom d’Haïk, à cause de la victoire remportée ; d’où le canton encore à présent s’appelle Vayots D’zor (vallée des Arméniens). La colline où Bélus succomba avec ses braves guerriers fût nommée par Haïk Kérez-mank (les tombeaux), et l’on dit encore à présent Kérezmank. Le corps de Bélus étant peint de divers couleurs, dit [Mar Abas Catina], Haïk le fit transporter à Hark, et enterrer sur une hauteur à la vue de ses femmes et de ses fils. Or notre pays est appelé Haïk, du nom de notre ancêtre Haïk.


CHAPITRE XII.

Races et filiations des descendants de Haïg. Ce que chacun de ses descendants a fait. ――

Après ces événements , une foule de faits sont racontés dans ce livre ; mais nous n’inscrirons ici que ce qui est nécessaire à notre histoire . «< Après cette expédition , Haïg, dit [ Mar Apas Catina], retourna à sa même habitation , et donna à Gatmos, son petit-fils , une grande partie du butin fait à la guerre , ainsi que plusieurs des plus braves de ses gens ; puis il lui ordonna de demeu rer dans son séjour primitif. Ensuite Haïg, s’en étant allé , s’arrêta au lieu appelé Hark. Il avait engendré son fils Arménag à Babylone , ainsi que nous l’avons dit plus haut ; après quoi , ayant vécu encore de longues années , il meurt , laissant à Arménag le gouvernement de la nation tout en tière.

Arménag laisse deux de ses frères , Khor et Manavaz avec toute leur suite, au lieu appelé Hark, ainsi que Paz , fils de Manavaz. Celui- ci re cut Hark en apanage ; son fils eut en partage au nord-ouest le littoral de la mer salée, qu’il ap pelle de son propre nom , ainsi que le canton. De Manavaz et de Paz sont issues, dit - on , les familles satrapales des Manavazian , des Peznouni , des Ouortouni qui, après saint Tiridate (Dertad), se sont détruites, assure-t-on , l’une l’autre dans les combats. Khor multiplie au nord et fonde des villages. De lui est issue la grande satrapic de la race des Khorkhorouni , hommes braves et re nommés , comme le sont encore leurs descendants actuels .

Arménag , einmenant avec lui toute la multi tude des siens , se dirige au nord- est , arrive et débouche dans une plaine encaissée , entourée de hautes montagnes , traversée par des fleuves im pétueux venant de l’ouest ; cette plaine, située à l’est , s’étend au loin sous les rayons du soleil . Au pied des montagnes jaillissent quantité de sources limpides qui , réunies en fleuves à leurs confins , à la naissance des montagnes , au bord de la plaine , jeunes encore, se promènent comme des jeunes filles. Mais la montagne au sud, qui regarde le soleil, avec son sommet neigeux , s’élevant à pic, qui ne peut être atteint en moins de trois jours par un voyageur muni d’une bonne cein ture, à ce que rapporte un des nôtres , — se ter mine doucement en pointe ; c’est véritablement une vieille montagne au milieu de montagnes d’une formation plus récente. Dans cette plaine profonde , Arménag s’établit ; il couvre d’édifices. -