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Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/133

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cour impériale. Ce fut seulement vers le XIIIe siècle que les rois et l’Église entreprirent d’extirper par la force l’élément oriental.

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A l’autre extrémité de l’Italie, Venise est une ville grecque. Sa prospérité s’est accrue à mesure que déclinait celle de Ravenne, sa voisine. Dépeuplée par Justinien II, ruinée par l’avidité des exarques, la capitale de l’Italie byzantine était déjà bien déchue de son ancienne splendeur, quand, au milieu du VIIIe siècle, elle tomba aux mains des Lombards pour passer bientôt à celles du pape. Au contraire, Venise sut maintenir son indépendance contre les Lombards et les Francs ; la suzeraineté nominale des empereurs grecs qu’elle affecta de reconnaître fut la condition même de sa fortune. Dotée par eux d’une foule de privilèges, elle multiplia ses comptoirs sur les côtes de la Méditerranée et bientôt accapara la plus grande partie du commerce entre l’Orient et l’Occident. Mais, avec les produits de l’empire, les marchands vénitiens rapportaient dans leur patrie la civilisation byzantine. Tout y rappelait la Grèce, le costume, les mœurs, le cérémonial de la cour des doges et ces titres d’hypatos et de protospathaire dont les parait la cour impériale. C’est à l’Orient que Venise empruntait quelques-unes de ces industries de luxe où à son tour elle excella, telles que l’art de travailler le verre et le cristal, de dorer les cuirs.

Aussi, pendant plusieurs siècles, les monuments vénitiens rappellent-ils souvent ceux qu’on élevait à Constantinople. Quand le doge Pierre Orseolo, en 976, entreprit la construction de cette merveilleuse église de Saint-Marc qui ne fut consacrée qu’en 1085, s’adressa-t-il à des architectes nés en Grèce ? Aucun document ne le prouve ; mais il est certain que les constructeurs de ce monument, quel que fût leur lieu d’origine, pratiquaient l’architecture byzantine dans toute sa pureté : il n’est point jusqu’aux matériaux, marbres, colonnes, qui ne paraissent en grande partie empruntés à l’Orient. Cependant, même à Venise, les types grecs ne dominaient point exclusivement ; aux environs, à Murano, à Torcello, à Grado, etc., les formes latines repa-