Aller au contenu

Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

les choses spirituelles pour le tracas des affaires, la théologie pour le droit.

Noyée sous le flot des affaires sans nombre qui affluent vers elle, elle perdit de vue les horizons de la spiritualité. Grégoire le Grand se plaignait déjà que son esprit, fatigué de soucis, ne fût plus capable de s’élancer vers les régions supérieures. Combien, depuis cette époque, les choses s’étaient aggravées ! « Emporté, écrivait Innocent III, dans le tourbillon des affaires qui m’enlacent de leurs nœuds, je me vois livré à autrui et comme arraché à moi-même. La méditation m’est interdite, la pensée presque impossible ; à peine puis-je respirer. » — Une autre particularité sur laquelle se tait Innocent III, mais qui résulte de faits épars dans sa correspondance, c’est que, forcé par la multiplicité des affaires, auxquelles il ne pouvait suffire, d’élargir en proportion la sphère d’action ou d’influence de ses cardinaux et de ses légats, il les laissait empiéter sur son autorité et s’arroger une indépendance qu’il était impuissant à réprimer. On peut même dire, sans outrepasser la vérité, que, dans ses lettres, Innocent III apparaît plus d’une fois comme captif dans le cercle que forment autour de lui ses cardinaux. Ainsi, quand on y regarde de près, on s’aperçoit que ce pape, maître absolu de l’Église, était écrasé par les affaires et dominé par ses conseils.

F. ROCQUAIN, La papauté au moyen âge, Paris. Didier et Cie, 1881, in-8º. Passim.


III. — LE « LIVRE DES CENS » DE L’ÉGLISE ROMAINE


LE « DENIER DE SAINT-PIERRE »


L’Église romaine a eu, de très bonne heure, de grandes propriétés foncières. Aussi éprouva-t-elle bien vite la nécessité de faire dresser un état de ses revenus, ou, comme on disait alors, un « Polyptyque » ; à la fin du Ve siècle, le pape Gélase s’ac-