Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/67

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indéfiniment, dit-il : infinita inquisitio esse non potest. » D’ailleurs à quoi bon chercher ? « Il n’y a pas besoin de curiosité, curiositate opus non est, après le Christ et l’Évangile. » Il y a une règle à laquelle il faut se tenir : « La plénitude de la science est d’ignorer ce qui est contraire à cette règle. » C’est merveille de voir comment le christianisme, en se répandant sur le monde, s’adaptait aux différents milieux. Au temps de l’antiquité païenne, les Grecs avaient pensé tandis que les Romains agissaient ; la vie intellectuelle romaine, très tardive, avait été le reflet de la vie intellectuelle hellénique, et Rome n’avait manifesté son originalité que dans le domaine du droit. Au temps de l’antiquité chrétienne, l’esprit hellénique cherche sans cesse et toujours disserte ; le chrétien romain arrête la doctrine et tout de suite il est prêt à légiférer sur la discipline et sur la foi.

L’autorité trouva bientôt un organe régulier dans la hiérarchie qui se constituait et dans la puissance impériale. A peine l’empereur fut-il entré dans l’Église que la liberté en sortit. L’hérésie devint une affaire d’État. Auparavant, elle pouvait ne troubler qu’une ou deux provinces, et les évêques des pays où elle se produisait se contentaient de rejeter en concile les opinions hétérodoxes ; désormais elle occupa la chrétienté entière. Arius est jugé par l’Église universelle, l’empereur présent et présidant, et les conciles font de leurs décisions des articles de foi, que l’empereur transforme en articles de loi. Comme la victoire de l’Église sur le paganisme la dispense de toute tolérance envers les dissidents, l’hérétique devient le grand ennemi. Déjà se disaient de dangereuses paroles : « Mieux vaut errer dans les mœurs que dans la doctrine ;… mieux vaut un païen qu’un hérétique…. »

Du moins, les controverses demeurent grandes aux IVe et Ve siècles. On discute sur la nature du Verbe pour ou contre Arius, sur la destinée des âmes pour ou contre Origène, sur le libre arbitre pour ou contre Pélage. Les adversaires sont de haute taille, car l’orthodoxie est défendue par saint Augustin et par saint Jérôme, et les écoles théologiques d’Alexandrie et de Syrie procèdent toujours selon les règles d’une méthode scientifique. Mais le temps marche et la culture ancienne dépérit. L’Église oublie ce qu’elle lui doit, la dédaigne comme superflue