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[Lect. VII.]
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RIG-VÉDA. — SECTION PREMIÈRE.

votre voie. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

2. Qui demande, obtient. La femme a obtenu un mari. Le désir des deux époux s’est enflammé ; et la femme a conçu un germe précieux de cet amour[1]. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

3. Dévas, que l’heureux aliment destiné à ce brillant (nourrisson) n’aille point tomber sans effet ! Ne soyons pas réduits à perdre ce (fils) fortuné, digne de nos libations ! Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

4. Je m’adresse, avant tout, au dieu protecteur du sacrifice. (Agni) notre messager peut bien dire (aux autres dieux) : « Qu’est devenu le fruit de nos sacrifices passés ? Quel est votre nouveau favori ? » Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

5. Ô dieux, qui habitez ces trois mondes qu’enveloppe la lumière céleste, où est pour vous la justice ou l’injustice ? Qu’est devenu le prix de notre ancienne piété ? Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

6. Qu’avons-nous retiré de notre sacrifice ? Où est la forme de Varouna ? Sur quelle route est le grand Aryaman ? Comment pourrons-nous triompher de nos ennemis ? Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

7. C’est moi qui, plus d’une fois, ai versé le soma et chanté des hymnes en votre honneur ; et c’est moi que surprend le malheur, tel que le loup (surprend) la biche altérée. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

8. Des douleurs poignantes[2], pareilles à des rivales jalouses, me déchirent de tout côté. Ô Satacratou, moi qui t’ai célébré, la peine me dévore, de même que les rats se dévorent la queue[3]. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

9. Ma demeure est l’endroit même où brillent les sept rayons lumineux[4]. Tel est l’espoir du fils des Eaux, de Trita[5] : il chante pour obtenir sa délivrance. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

10. Les cinq (dieux) qui donnent l’abondance[6] et qui se tiennent au centre du monde, après être venus, au milieu des autres, briller avec tant de gloire, sont retournés (dans leur séjour). Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

11. Les (rayons) d’Agni aux ailes légères siégent seuls sous cette voûte céleste qui embrasse tout : ils écartent de sa route le loup[7] qui traverse les grandes ondes. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

12. Ô dieux, à vous j’adresse cette prière nouvelle, qui est faite pour vous plaire. Voilà que les ondes (du sacrifice) s’approchent d’Agni ; voilà que le soleil a rempli sa carrière. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

13. Ô Agni, tu es l’allié des Dévas, et cette alliance doit être célébrée par eux. Viens t’asseoir à notre foyer, comme jadis à celui de Manou, et, sage entre tous, fais le sacrifice aux dieux. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

14. Oui, qu’Agni, sage entre tous, vienne, en qualité de sacrificateur, s’asseoir à notre foyer, comme jadis à celui de Manou ; que ce dieu, prudent parmi les autres dieux, les appelle à nos holocaustes. Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

15. Ce (dieu) sauveur accomplit l’œuvre sacrée ; nous l’invoquons, lui qui peut nous conduire dans la bonne voie ; il tire du cœur la prière, il est digne de nos louanges. Naisse donc le sacrifice ! Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

16. Cet Aditya qui a été fait pour être avec tant de gloire le voyageur céleste, ô Dévas, n’est pas encore arrivé. Ô mortels, vous ne le voyez pas ! Ciel et Terre, voyez ce que je suis.

17. Trita, tombé dans un puits, appelait ainsi

  1. Le texte est plus expressif. Je pense que cette strophe fait allusion au rapprochement des deux pièces de l’aranî, d’où naît le feu.
  2. Le commentateur dit que ce sont les côtés du puits qui déchirent les chairs de Trita.
  3. Comparaison triviale, sur laquelle le commentateur n’est pas d’accord avec lui-même ; car il doute si le mot sisnâni signifie queue, ou appât ou même nichée.
  4. Trita, étant le soma personnifié, habite le lieu du sacrifice, où brille Agni aux sept rayons.
  5. Trita est fils des Eaux, puisqu’il est la libation elle-même. Il veut être délivré, c’est-à-dire tiré du bassin qui le renferme, pour être jeté dans le foyer.
  6. Les cinq personnages sont : Agni sur la terre, Vâyou dans l’atmosphère, Aditya dans le ciel, Tchandramas dans la région des constellations, et Vidyout (dieu de la foudre) dans les eaux du nuage.
  7. Le texte porte le mot vrica, qui, rendu quelquefois par brigand et ravisseur, signifie aussi loup. Le commentateur, incertain, présente deux sens. Il suppose d’abord que Trita, au fond du puits, a peur que quelque loup ne vienne pour le dévorer, et que le Richi prie les rayons du Jour d’éloigner cet animal affamé. Il donne ensuite un sens trouvé par Yâsca. Le loup, c’est Tchandramas, la lune, car vrica doit se dire d’un astre quelconque soumis à une marche périodique ; les grandes ondes, ce sont les vagues célestes, c’est l’air ; et dans cette hypothèse, Trita dit que les rayons ont la propriété de faire disparaître la lune.