Page:Langlois - Rig Véda.djvu/121

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[Lect. VIII.]
113
RIG-VÉDA. — SECTION PREMIÈRE.

9. Comme le pasteur (soumis devant son maître) je t’honore et t’adresse mes hommages. Père des Marouts, accorde-moi le bonheur. Ta faveur est le bien le plus admirable ; voilà pourquoi nous implorons ta protection.

10. Ô toi, qui es le refuge des hommes, éloigne de nous ta (colère), qui tue les vaches et les hommes ! Que ta bénédiction soit avec nous ! Ô dieu, sois notre bienfaiteur et notre patron ! conserve-nous, toi qui règnes sur un double domaine[1] !

11. C’est à Roudra que nous adressons cet hymne, en implorant son secours. Que ce (dieu) accompagné des Marouts, écoute notre prière ! Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE III.

Au Soleil, par Coutsa.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le magnifique flambeau des dieux, l’œil de Mitra, de Varouna et d’Agni, le Soleil, âme de tout ce qui existe, a rempli le ciel, la terre et l’air.

2. Comme l’époux suit sa (jeune) épouse, le Soleil suit aussi la divine et brillante Aurore, à l’heure où les prêtres, attendant pour honorer les dieux les moments favorables, adressent à leur digne (protecteur) un hommage digne de lui.

3. Les chevaux du Soleil, nobles, rapides, brillants, s’élancent dans leur route, dignes, comme lui, de nos hommages. Baissant la tête sous le joug, ils s’attachent à la voûte céleste, et s’empressent de commencer leur révolution entre la terre et le ciel.

4. Et telle est la fonction divine, la fonction sublime du Soleil. À la moitié de sa course circulaire, il retire en lui-même ses rayons ; et quand il dételle les chevaux de son char, la nuit couvre l’univers de son voile.

5. Ainsi, pour nous faire jouir de la vue de Mitra et de Varouna, le Soleil manifeste sa forme à la face du ciel. Sans relâche, ses coursiers nous ramènent sa figure, tantôt brillante, tantôt noire.

6. Divins rayons du Soleil levant, délivrez-nous de toute faute honteuse. Qu’ils nous protègent également, Mitra, Varouna, Aditi, la Mer, la Terre et le Ciel !


HYMNE IV.

Aux Aswins, par Cakchivan.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Je prépare comme un lit[2] d’honneur aux (dieux) véridiques. Je produis le chant (sacré), de même que le vent produit (l’onde) du nuage. Ce sont les Aswins qui, sur un char et à travers les armées (ennemies), amenèrent une épouse au jeune Vimada[3].

2. Vous marchez avec fermeté, avec vitesse, appelés par les dieux ; (divinités) véridiques, l’âne (attelé à votre char), dans vos combats qui enrichissent Yama[4], terrasse des milliers d’ennemis.

3. Ô Aswins, Tougra[5], tel que l’homme qui va mourir et qui se défait de son trésor, avait confié à la mer (son fils) Bhoudjyou. Vous avez sauvé ce Bhoudjyou sur votre propre vaisseau, (sur un vaisseau) aérien qui s’élève au-dessus des eaux.

4. (Dieux véridiques), au bout de trois jours et de trois nuits vous avez, sur votre triple char[6], ailé, rapide, porté sur cent roues et attelé de six coursiers, ramené Bhoudjyou, de l’élément humide, sur le rivage de la terre ferme.

5. Telle fut votre prouesse sur la mer immense, incertaine, insaisissable ; et vous avez, ô Aswins,

  1. Traduction du mot dwibarhâh. Voy. page 85, col. 2, note 1.
  2. Le lit composé de cousa.
  3. Voy. p. 73, c. 1, note 3; et p. 110, c. 2, note 6.
  4. Dieu de la mort. Les Aswins, dans leurs révolutions journalières, voient s’éteindre les générations.
  5. Voy. p. 109, c. 2, note 3. Le Râdjarchi Tougra, poursuivi dans une île par ses ennemis, voulut leur enlever du moins une partie de leur proie ; il fit avec un corps de troupes embarquer son fils Bhoudjyou. Le vaisseau qui les portait périt dans des parages éloignés. La protection des Aswins fut utile au jeune Bhoudjyou, qui, suivant la légende, se sauva par la route de l’air avec ses compagnons, et, au bout de trois jours et trois nuits, fut rendu à son père. Mon opinion personnelle est que la plupart de ces légendes ne sont que des contes allégoriques. Je crois que Bhoudjyou doit être le soleil, peut-être le soleil pendant la nuit.
  6. Les Aswins sont portés tantôt sur un char, tantôt sur un vaisseau. Voy. p. 70, c. 2, note 1. Nous avons déjà expliqué (p. 62, c. 2, note 4) l’emploi du nombre trois, quand il est question des Aswins. Deux nombres nouveaux sont mentionnés ici : le nombre six, qui rappelle les six ritous ou saisons, et le nombre cent, pour lequel je n’ai aucune explication. C’est peut-être un nombre indéfini, exprimant une grande quantité. Ainsi Indra est le dieu aux cent prouesses (Satacratou) ; sa foudre a cent tranchants (Satadhâra). Vichnou, plus tard, a reçu les épithètes de Satadhâman, de Satânanda, de Satâvarttin. Ce dernier mot se rapproche de l’idée contenue dans ce passage où cent roues sont données au char des Aswins ; car Satâvarttin signifie qui a des centaines de révolutions. J’ose à peine dire que le nombre cent, répété trois fois, peut représenter les jours de l’année en nombre rond.