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PRÉFACE.

moins de tribus énoncées dans l’énumération si précieuse de la Bible ; et ces barbares enfin, dont l’histoire ne constate que les irruptions, les massacres, les incendies, les pillages, les Nubiens de l’Afrique, les Touraniens de l’Asie, ces ennemis éternels de l’Égypte et de l’Inde, et leurs fils, les Scythes, et les Parthes, leurs petits-fils ; et les peuples de Mosoch, de Gog, de Magog, de Thubal, dont il ne reste qu’un nom sans mémoire, dont pas un écho ne répète une syllabe de la langue ; ne sont-ils pas tous à jamais perdus, si l’on ne trouve un jour quelque mention de leurs actes dans des légendes encore ignorées ? L’histoire n’a-t-elle pas là une grande page blanche qu’il n’appartient qu’à la science moderne de remplir peu à peu, en éclairant l’avenir avec les lueurs du passé ?

C’est incontestablement à l’Orient qu’appartient l’honneur d’avoir commencé l’œuvre du perfectionnement humain. Tout s’y trouve, depuis les premières formules religieuses, jusqu’aux premières évolutions des sciences, des lettres et des arts. Dans les productions intellectuelles de ces vastes contrées, il y a plus qu’une augmentation du savoir général, il y a la révélation d’une loi providentielle, à laquelle tous les peuples ont obéi sans la connaître. Tandis que l’Indou, à la vive imagination, aux tendances métaphysiques, ébauchait presque tous les systèmes de religion et de philosophie, le Chinois patient, laborieux, pratique, développait les sciences morales et les appliquait à l’individu, à la famille, au gouvernement. L’Hébreu, isolé dans ses pérégrinations et dans ses luttes, et persévérant jusqu’à l’héroïsme, proclamait et maintenait la plus sublime des conceptions, le monothéisme pur, tandis que le sévère Iranien affirmait la responsabilité humaine, par le dogme de la résurrection. Le grave Égyptien démontrait, par ses monuments éternels, ce que peuvent la volonté et le génie de l’homme contre les efforts du temps, et par ses prêtres savants, ce que peut un sacerdoce intelligent sur la civilisation d’un pays ; de son côté, l’audacieux Chaldéen préparait les voies du ciel à la science astronomique et l’industrieux Phénicien colportait, sur ses navires, la civilisation asiatique le long du bassin de la Méditerranée, et jusqu’à la mer du Nord. Le Grec, aimé du soleil et des muses, transformait l’art et la poésie des orientaux, en les idéalisant, et la philosophie, en lui imprimant un nouvel essor. Le Romain, au contraire, esprit positif et généralisateur, plus logique que le Chinois, presque aussi tenace que l’Hébreu, organisait les sciences politiques par son art de gouverner et par sa codification des lois.

De ces produits multiples et différents de l’intelligence, se complétant l’un l’autre, convergeant tous vers un même point, le progrès de l’humanité, ressort pour nous, la démonstration d’une œuvre d’ensemble, d’un but commun, dont la diversité des nations, leur antagonisme même, et les modifications successives qu’elles ont éprouvées, ne font que confirmer