Page:Langlois - Rig Véda.djvu/147

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[Lect. II.]
139
RIG-VÉDA. — SECTION DEUXIÈME.

que par leurs œuvres, leur piété, leurs prières, les (prêtres), prodiguant les offrandes et les invocations, ont enfanté, pour être leur ami, au milieu des sacrifices et des libations[1].

2. Agréez tous deux les présents et le soma de Pouroumîlha, que vous présentent ces dévots serviteurs qui sont pour vous comme des amis, Pouroumîlha vous appelle : (dieux) généreux, écoutez (la voix) d’un père de famille.

3. Les hommes vous comblent de louanges. C’est à votre force héroïque, ô (dieux) généreux, qu’il faut attribuer la naissance du Ciel et de la Terre[2], quand vous vous portez vers le feu du sacrifice, quand vous venez prendre la part que vous fait l’homme religieux dans ses invocations et son œuvre (pieuse).

4. (Dieux) qui donnez la vie[3], cette enceinte (sacrée) doit vous être chère ; vous aimez le sacrifice, et vous en êtes l’ornement. Du haut du ciel, par un secours puissant et opportun, vous nous aidez à traîner notre fardeau : tel (à un char) on attelle un taureau.

5. Vous arrivez avec grandeur sur cette terre, et vous vous approchez de la coupe (de nos libations). (Voyez comme) ces vaches (du sacrifice[4]), et pures et fécondes, (brillent) dans leur pâturage. On entend leur bruit dans les airs ; elles tendent vers le soleil, telles que les Aurores bienfaisantes.

6. Pour votre sacrifice les (flammes) s’élèvent, présentant l’apparence d’une belle chevelure. Mitra et Varouna, daignez venir en ces lieux. Descendez, accueillez nos vœux. Vous régnez sur la prière du sage.

7. Quand le sage, prodiguant et l’offrande et la louange, vous honore par ses invocations et ses sacrifices, (homme) accompli dans la science de prier, alors vous vous approchez de lui, vous agréez ses présents, vous approuvez ses vœux et comblez ses désirs : vous venez vers nous.

8. Ô (dieux) qui aimez le sacrifice, vous êtes les premiers dans nos offrandes et nos libations : nous sommes unis à vous de cœur. L’hymne et la prière sont d’accord pour vous exalter. Votre âme invincible peut se satisfaire magnifiquement.

9. Vous recevez de superbes présents ; ô (dieux) vaillants, vous jouissez d’une opulence, d’une grandeur que relèvent mille prestiges de puissance. Ni les cieux avec les jours, ni les mers, ne connaissent rien d’égal à votre divinité, rien qui mérite les hymnes et les libations qu’on vous adresse.


HYMNE XVI.

À Mitra et à Varouna, par Dîrghatamas.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Vos vêtements sont amples et magnifiques. Quand vous les quittez, vous le faites avec sagesse, et ils ne se trouvent jamais déchirés. Triomphez de tout ce qui est mauvais ; car vous êtes, ô Mitra et Varouna, unis avec la bonté.

2. L’estime que l’on peut faire des hommes n’est jamais complète. Tel est juste et prudent, il aime les sages ; mais il est cruel. Tel autre se fait craindre et abuse de sa force pour opprimer un plus faible que lui[5]. Ô dieux, un tel reproche ne peut vous être adressé.

3. La première des (déités) douées d’un pied (léger), en est bientôt privé[6]. Mitra et Varouna, qui dirait la même chose de vous ? Votre enfant porte le fardeau de ce monde, soutenant ce qui est bon, repoussant ce qui est mauvais[7].

4. Nous voyons bien cet époux des jeunes (Aurores) s’avancer, poursuivre sa révolution, et couvrir ces espaces élevés et vastes, demeure de Mitra et de Varouna.

5. Mais, au moment de sa naissance, il était sans chevaux et sans rayons, (ce soleil), qui, rapide et retentissant, marche au plus haut des cieux. Que (les hommes) fassent de brillants apprêts, et qu’en l’honneur de Mitra et de Varouna ils allu-

  1. Ce mot est entendu autrement par le commentateur, qui ne voit pas ici les libations, mais les ondes des nuages, les eaux qui enveloppent Agni vêdyouta.
  2. Ces dieux, dans leur révolution, amènent le jour, qui révèle le ciel et la terre : le poëte leur en attribue la naissance.
  3. Le poëte les appelle du nom d’Asoura.
  4. Ces vaches sont les flammes, les rayons d’Agni.
  5. L’expression de l’auteur est singulière. Elle se traduit ainsi littéralement : triangularem occidit quadrangularis.
  6. Il est ici question de l’aurore : rapide et légère, elle est arrêtée par le soleil ; elle disparaît dans ses rayons, suivant le poëte indien, elle perd son pied. La mythologie postérieure, en substituant à l’aurore le personnage d’Arouna, l’a privé de pieds : on trouve ici l’explication de ce mythe.
  7. Mitra et Varouna, dit le commentaire, c’est le Jour et la Nuit (ahorâtrô). Dans l’intervalle du jour et de la nuit naît le soleil, qui semble sortir de leur sein et devient leur fruit, leur enfant, garbha. Le soleil amène la lumière et repousse les ténèbres, et se montre de cette manière l’ami du bien et l’ennemi du mal.