Page:Langlois - Rig Véda.djvu/46

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sent, et vont être bientôt les Brahmanes, les Kchattriyas, et les Vaiçyas, c’est-à-dire les prêtres, les guerriers, et les cultivateurs. Quant aux ouvriers, les Soudras, l’interprétation moderne veut qu’ils soient les vaincus, les esclaves, et voilà pourquoi on ne les auraient pas initiés au Véda.

Si donc l’Awçameda dut commencer la transformation du Rig-Véda, c’est aussi à partir de cette époque que doit dater le culte de Brahma, la prière personnifiée, et toute l’organisation brahmanique. Mais, nous l’avons dit, les hymnes qui se rapportent à cette phase sont disséminés, et il n’est pas possible, dans l’état présent de nos connaissances sur l’Inde, de les classer méthodiquement. Cependant il est facile de discerner quand le père de famille cède à un ministre spécial du culte l’ordre et les détails du sacrifice[1] ; il est facile de reconnaître une sorte de sacerdoce quand le prêtre se glorifie des dons et des récompenses qu’accordent les chefs et les riches à son intervention[2] ; enfin lorsque les tableaux primitifs, les invocations naïves aux forces de la nature se compliquent d’une sorte de métaphysique, lorsque dans la dernière section apparaissent successivement Vâk, la parole sainte, Paramâtma, l’âme suprême, Pradjapati, le dieu créateur, Gandharva, l’oiseau divin qui remplace Agni comme messager entre la terre et le ciel ; lorsqu’on s’adresse tour à tour à Patha, l’arbre de la science sacrée, à Véna, le nuage du sacrifice, à Pouroucha, le principe masculin, qui a pour auxiliaire Viradj, la substance corporelle, et à Adhipouroucha, l’âme incorporée ; lorsqu’on invoque Nirritti, la mort, pour la repousser, la Pauvreté, pour la maudire, la Bienfaisance, pour l’implorer, la Libéralité, pour l’exciter, les Plantes pour qu’elles chassent la maladie, le Courroux divin, pour qu’il s’apaise, les Mânes d’un jeune richi, pour qu’il reprenne la vie ; lorsqu’enfin l’on raconte si étrangement les noces de Sourya, le soleil, considéré à la fois comme flamme et comme rayon ; lorsqu’on a fait à Sindhou, l’Indus, une sorte d’adieu, et que l’on énumère toutes les autres rivières qui descendent vers la péninsule ; lorsqu’on chante le Sacre d’un roi, qui va être bientôt le conquérant du Gange, à ce moment significatif, le Védisme, sans avoir cessé et surtout sans avoir épuisé sa poésie, fait place à d’autres inspirations, qui souvent seront aussi grandes, quoique d’un genre différent. Ces nouvelles inspirations appartiennent au Brahmanisme, c’est-à-dire à la période d’organisation indienne.

Max. Grazia — Jules David.
  1. Voir : section III, lecture iv, hymne 3 ; section IV, lecture v, hymne 1 ; section V, lecture vi, hymne 3.
  2. Voir : section IV, lecture i, hymne 10 ; section IV lecture ii, hymne 1.