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[Lect. VI.]
INDE. — POÉSIE LYRIQUE.

sans interruption, apportent tour à tour la clarté.

8. (Dieu) caché ou (dieu) apparent, les Dévas sont en lui. Nous ne connaissons rien de son existence. Que Mitra, qu’Aditi, que le divin Savitri proclament en ces lieux devant Varouna notre innocence.

9. Écoute-nous, ô Agni ! dans cette demeure où tu siéges, attelle ton char rempli de présents immortels. Amène-nous le Ciel et la Terre, qui ont des dieux pour enfants. Qu’aucun ne soit exclu de ces lieux.


HYMNE VIII.
Aux deux chars de l’holocauste[1]. — Richi : Vivaswan, fils d’Aditya.
(Mètres : Djagatî et Trichtoubh.)

1. J’attelle le matin votre char au milieu des cérémonies et des invocations. Que l’hymne suive la route que lui trace le maître (du sacrifice). Que tous les enfants de l’immortel (Pradjâpati)[2], répandus dans les demeures célestes, entendent ma voix.

2. Vous allez comme un couple attaché au même joug. Que les enfants de Manou, dévoués au culte des dieux, vous chargent de présents. Prenez la place qui vous est destinée ; occupez-la avec honneur et intelligence. Que les breuvages (sacrés) nous arrivent par vous.

3. Par cinq dégrés[3] je monte vers vous. Quatre pieds soutiennent ma marche[4]. Je profère la syllabe sacrée[5], et je purifie mon hymne au sein de Rita.

4. Comme la mort avait été établie pour la race (humaine), elle le fut aussi pour les Dévas. Le sage Vrihaspati a été choisi pour être le chef du sacrifice. (Un moment arrive) que son corps est livré à Yama.

5. Mais (Agni renaît) ; son berceau est entouré des Marouts[6] ; il redevient père (du sacrifice), et sept de ses (nouveaux) enfants s’assemblent pour former Rita. Les deux chars du double (holocauste) brillent également ; ils apparaissent chargés d’une égale abondance.


HYMNE IX.
Aux Pitris[7]. — Richi : Yama.
(Mètres : Vrihatî, Trichtoubh et Anouchtoubh.)

1. Honore par l’holocauste le fils de Vivaswân, le royal Yama, qui traverse les grands abîmes, qui est la voie et le rendez-vous des nations.

2. Yama le premier nous indique la route que nous suivons tous infailliblement. Nos pères l’ont parcourue avant nous. Nous naissons pour y marquer aussi nos pas.

3. Le maître de Mâtali[8] doit sa grandeur aux Gavyas[9], Yama aux Angiras, Vrihaspati aux Rikwans[10]. (Il en est d’autres encore) dont les dieux reçoivent leur accroissement, et qui les réjouissent les uns par la Swaha, les autres par la Swadha[11].

4. Yama, place-toi sur le siége du sacrifice avec les Pitris Angiras. Ô roi, que la prière des sages t’amène ici ! sois heureux de notre holocauste.

5. Viens, Yama, avec les honorables Angiras de formes diverses, et réjouis-toi. Assis sur le gazon

  1. Il me semble, d’après la teneur de l’hymne, que l’auteur désigne par ces mots les deux Agnis, qui se succèdent la veille et le lendemain, l’un ancien, l’autre nouveau, l’un mort, l’autre renaissant.
  2. Ce mot signifie père des êtres : il est ajouté au texte.
  3. L’auteur fait allusion sans doute à cinq genres d’offrandes, ou bien désigne-t-il les cinq strophes qui composent cet hymne.
  4. Le trichtoubh se divise en quatre Padas.
  5. L’Akchara ou Prânana est la syllabe oum.
  6. Les Marouts sont ici considérés comme des chantres (Stotârah).
  7. Les Pitris ou Pères sont ordinairement regardés comme Mânes des ancêtres de tous les êtres. Voyez au reste le liv. III des Lois de Manou, st. 192 et suiv. Cependant le lecteur verra, par la lecture de ces hymnes, s’il faut entendre ce mot dans ce sens. Je disais, dans la p. 515, c. 2, n. 4, que les Pitris étaient les Pères du sacrifice, soit que les instituteurs de Rites aient été considérés comme des Dévas, soit que les Rites eux-mêmes aient été personnifiés. Agni est le premier père ou Pitri ; tous les feux ont aussi reçu ce nom. Envoyant les noms donnés aux différentes classes de Pitris, on ne peut s’empêcher de penser que ce sont des représentants des diverses parties du sacrifice, plutôt que les Mânes des diverses espèces d’êtres. Les prêtres peuvent bien les regarder comme leurs ancêtres, dans ce sens qu’ils les ont précédés soit réellement, soit d’une manière symbolique, dans la célébration des mystères sacrés. Mais certainement aux termes dont se sert le Rig-Véda je ne puis reconnaître les pères du genre humain. Cette idée que j’émets explique le passage des Lois de Manou, qui dit que les Pitris sont nés avant les dieux.
  8. Ainsi s’appelle le conducteur du char d’Indra.
  9. Nom d’une classe de Pitris sacrés. Voy. Lois de Manou, liv. III, st. 199. Ce sont les œuvres des sages, Cavyas, personnifiées comme Richis.
  10. Je suis obligé de faire un nom propre de ce mot, qui signifie possesseur du Rig, chantre, poëte.
  11. La Swâhâ est l’invocation, la Swadhâ est l’offrande.