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[Lect. V.]
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RIG-VÉDA. — SECTION PREMIÈRE.

digne d’envie, telle que tous les efforts (de nos ennemis) ne puissent la renverser !

9. Ô Agni, accorde-nous, avec la sagesse, une opulence qui nous procure tous les plaisirs de la vie, et nous rende l’existence agréable !

10. Gotama, toi qui aspires au bonheur, offre à cet Agni, dont la flamme est effilée, nos hymnes et nos chants pieux.

11. Ô Agni, qu’il périsse celui qui cherche à nous nuire soit de près, soit de loin ; et augmente notre prospérité.

12. Agni a mille yeux[1] ; (divinité) prudente, il écarte les Rakchasas ; sacrificateur, il honore (les dieux), digne lui-même d’être honoré !


HYMNE XIX.

À Indra, par Gotama.

(Mètre : Gâyatrî.)

1. Le soma enivrant est préparé, et le prêtre y ajoute l’harmonie de ses chants. (Dieu) puissant qui portes la foudre, tu as avec vigueur chassé Ahi des plaines (célestes), consacrant ainsi ta royauté.

2. Nos joyeuses libations, versées en ton honneur et portées sur les ailes de l’épervier (poétique)[2], ont enivré ton cœur. Fort de ces offrandes, (dieu) armé de la foudre, au milieu des ondes (célestes), tu as avec vigueur frappé Vritra, consacrant ainsi ta royauté.

3. Viens, approche, et triomphe ; car ton arme est invincible. Indra, ta force est véritablement virile ! Frappe Vritra, et par la victoire délivre les ondes, consacrant ainsi ta royauté.

4. Ô Indra, de la terre au ciel, tu es vainqueur de Vritra. Envoie-nous ces ondes que poussent les Marouts, et qui sont une source de vie, consacrant ainsi ta royauté.

5. Vritra s’agite ; Indra courroucé accourt, et de sa foudre lui heurte le front, invitant les ondes à couler, et consacrant ainsi sa royauté.

6. Indra, heureux de nos hommages, a heurté le front de Vritra de sa foudre, armée de cent pointes. Il désire ouvrir à ses amis le chemin de l’abondance, consacrant ainsi sa royauté.

7. Foudroyant Indra, toi qui portes le tonnerre, tu possèdes une force indomptable. Mais tu sais aussi employer la magie, et quand le magicien (Vritra) se cachait sous la forme d’un cerf[3], tu l’as frappé, consacrant ainsi ta royauté.

8. Les éclats de ta foudre sont allés (rouvrir les sources) des quatre-vingt-dix fleuves[4]. Ô Indra, ta vigueur est immense ; tu déploies la force de tes bras, consacrant ainsi ta royauté.

9. Des milliers (d’adorateurs) se réunissent pour honorer Indra. En voilà vingt[5] (surtout) qui célèbrent sa gloire ; des centaines (de riches) chantent ses louanges. L’œuvre sainte est préparée en l’honneur du dieu qui sait consacrer sa royauté.

10. Indra a brisé la force de Vritra ; sa vigueur a vaincu la vigueur (de l’ennemi) ; sa puissance est grande, et, en frappant Vritra, il nous donne (la pluie), consacrant ainsi sa royauté.

11. Le ciel et la terre, témoins de ton courroux, ont frémi de crainte quand, escorté des Marouts, ô foudroyant Indra, tu attaquais Vritra avec vigueur, consacrant ainsi ta royauté.

12. Vritra, par son bruit, par ses mouvements, ne put effrayer Indra ; il se trouva pressé par la foudre de fer, armée de mille pointes, (du dieu) consacrant ainsi sa royauté.

13. De ta foudre tu combattais la foudre de Vritra ; et quand tu cherchais à terrasser Ahi, ta force, ô Indra, éclatait dans le ciel, consacrant ainsi ta royauté.

14. (Dieu) qui portes la foudre, au bruit que tu causes, les êtres, animés et inanimés, sont tous émus ; Twachtri lui-même[6], effrayé de ta colère, tremble, ô Indra, en te voyant consacrer ainsi ta royauté.

15. Nous ne pouvons suivre sa marche rapide : quel autre pourrait le surpasser en puissance ? Les Dévas ont conféré la vigueur, la force et la splendeur suprême à cet Indra qui consacre ainsi sa royauté.

  1. Le poëte donne à Agni l’épithète de Sahasrâkcha (millioculus), que les Pourânas prodiguent pour Indra. Les yeux d’Agni, dit le commentateur, ce sont ses flammes.
  2. Le texte porte le mot Syéna, qui est le nom de l’épervier, et en même temps le nom d’un mètre poétique. Le commentaire indique ce sens en représentant le soma comme porté sur les ailes de la Gâyatrî. Sans cette indication du commentateur, j’aurais entendu que le soma est porté vers Indra par Agni, qui a la rapidité de l’épervier.
  3. Allusion aux formes variées et légères que prennent les nuages apportés par le vent.
  4. Nombre indéfini ; ailleurs c’est 99. Voy. p. 61, col. 1, note 4.
  5. Le commentateur dit que ces vingt personnes sont les seize ministres du sacrifice, le maître de maison et sa femme, le Sadasya ou maître des cérémonies, et le Samitri, chargé de l’aranî.
  6. Voy. p. 48, col. 1, note 5.