Page:Langlois - Seignobos - Introduction aux études historiques, 1899.djvu/191

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Mais la critique ne fait ici que détruire des renseignements illusoires, elle n’en fournit pas de certains. Les seuls résultats fermes de la critique sont des résultats négatifs. — Tous les résultats positifs restent douteux, ils se ramènent à dire : « Il y a des chances pour ou contre la vérité de cette affirmation ». Mais ce ne sont que des chances : une affirmation suspecte peut être exacte, une affirmation probable peut être fausse, on en voit sans cesse des exemples, et nous ne connaissons jamais assez complètement les conditions de l’observation pour savoir si elle a été bien faite.

Pour arriver à un résultat définitif il faut une dernière opération. Au sortir de la critique les affirmations se présentent comme probables ou improbables. Mais les plus probables même, prises isolément, resteraient de simples probabilités : le pas décisif qui doit les transformer en une proposition scientifique, on n’a pas le droit de le faire ; une proposition scientifique est une affirmation indiscutable, et celles-ci ne le sont pas. — En toute science d’observation c’est un principe universel qu’on n’arrive pas à une conclusion scientifique par une observation unique : on attend, pour affirmer une proposition, d’avoir constaté le fait par plusieurs observations indépendantes. L’histoire, avec ses procédés si imparfaits d’information, a moins que toute autre science le droit de se soustraire à ce principe. Une affirmation historique n’est, dans le cas le plus favorable, qu’une observation médiocrement faite ; elle a besoin d’être confirmée par d’autres observations.

    qu’on en ait démontré la fausseté, et si, par hasard, il ne s’est pas conservé de documents en contradiction avec elle, ils l’admettent provisoirement ; c’est ce qu’on fait encore pour les cinq premiers siècles de Rome. Ce procédé, malheureusement encore général, contribue à empêcher l’histoire de se constituer en science.