Aller au contenu

Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/136

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
132
BOILEAU.

génie doit avoir à son service une science technique qui lui permette d’élire toujours les moyens d’expression les plus sûrs et les plus puissants. De là l’importance attribuée dans l’Art poétique au métier, et l’abondance des préceptes de versification, de style et de composition.

Le poète fait son œuvre avec des mots : la technique, pour lui, c’est donc d’abord le maniement de la langue. Connaissance et respect de la langue, pureté, correction, éviter les tours vicieux, les termes impropres, ne jamais s’accorder un barbarisme ou un solécisme même en vue d’un effet à produire : on ne doit pas s’étonner que Boileau impose ces lois à un écrivain ; cela équivaut à exiger d’un peintre la connaissance du dessin. Ni la nouveauté, ni la hardiesse de l’expression ne souffrent de la correction grammaticale : Racine est là pour le prouver.

Viennent ensuite la clarté, sans laquelle ni la vérité ne se fait sentir, ni l’émotion ne se dégage — et la précision, par laquelle on ne reconnaît pas vaguement, en gros, la nature de l’objet, mais on le voit dans un degré particulier de force et de beauté, tel qu’il est en effet, mais revêtu par votre expression, d’après votre sensation, d’un caractère unique.

Puis le poète se sert du vers. Sans débattre la question sil y a des poèmes en prose, et semblant même l’admettre, quand il appelle de ce nom les romans, Boileau, en général, regarde le vers comme la forme originale et propre de la poésie. On sait combien il était sévère dans la pratique, et une