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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/84

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BOILEAU.

pas « l’âme bien enfoncée dans la matière », et n’était-il pas enfin « du dernier bourgeois » ? Mlle de Scudéry en prenait autant de pitié que de colère.

Pradon, éclairé par sa rancune, voit même quelque chose de plus : il caractérise assez bien la poésie de Boileau, lorsqu’il lui donne « la force des vers et la nouveauté des expressions », lorsqu’il lui reproche de manquer de verve et d’imagination, et de séduire le public par des « vers frappants » semés de place en place, lorsqu’il dit de la description du Repas ridicule : « C’est le fort de l’auteur, quand il a de ces peintures-là à faire ». Je n’ai pas dit autre chose au chapitre précédent.

Boileau ne répondit particulièrement à aucun des pamphlets qu’on fit contre lui. Plus modéré dans sa propre cause que dans celle de son ami Racine, il ne se laissa pas engager dans la voie des polémiques virulentes et des diffamations injurieuses, comme il le fit dans l’affaire de Phèdre. Il se contenta d’affirmer dans ses Préfaces qu’il avait usé de son droit en critiquant des auteurs comme auteurs ; que du reste on pouvait écrire contre ses œuvres, « attendu qu’il était de l’essence d’un bon livre d’avoir des censeurs ». C’est ce que disait Chapelain, mais il le disait de la Pucelle : et c’est un argument qui ne vaut que par l’occasion où l’on s’en sert. Au reste, les ennemis de Boileau ne perdirent rien à sa modération : sans leur répliquer directement, il ne manqua jamais, quand une épître ou une épigramme ou n’importe quel ouvrage en vers