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CORNEILLE.

ils deviennent dans le monde ce que leur père n’était que dans les actes des notaires, des gentilshommes. Mais, comme le dit fièrement Corneille :

Ils s’offrent tout entiers aux hasards du devoir.


Le gendre du Buat se fait tuer à Candie ; le plus jeune des Corneille, dès sa première campagne, en 1767, est blessé au siège de Douai et rapporté chez son père à Paris sur un brancard dont la paille répandue par la rue valut au poète une assignation à comparaître en simple police au Châtelet. Sept ans plus tard, devenu lieutenant de cavalerie au régiment de Carcado, enfermé dans Grave avec sa compagnie, le jeune homme fut tué dans une sortie. Par lui, la noblesse des Corneille avait eu son baptême de sang. Son père le pleura, avec un peu de la fierté du vieil Horace.

Corneille mourut en son domicile de la rue d’Argenteuil, dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre 1684. Il eut son frère Thomas pour successeur à l’Académie, et Racine, retiré, pénitent, racheta sa préface de Britannicus par un éloge impartial et magnifique de son ancien rival. Il est doux d’être juste envers un mort.

Un bourgeois honnête et laborieux, probe, pieux, très homme de famille, de mœurs régulières et sérieux, plus porté aux affections domestiques qu’aux libres passions, de cœur paisible et de tête solide, assez attaché à l’argent, très humble dans la vie sociale et se tenant à son rang, même un peu plus courbé qu’il n’eût fallu devant toutes les grandeurs de nom, de puissance et de fortune, forçant