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origenes de la littérature française.

moines qui aient fait le métier de chroniqueur, « le monde se pare d’une blanche robe d’églises neuves ». Saint-Front de Périgueux, l’abbaye du Mont-Saint-Michel, les églises d’Auvergne, tout cet art roman qui s’épanouit au xie siècle, l’art gothique qui le continue, voilà par où le moyen âge participa au désir de créer, à la faculté de sentir le beau. Il était nécessaire de le dire, car la littérature ici ne reflète pas avec le même éclat le génie national : si le Parthénon et une tragédie de Sophocle, une oraison funèbre de Bossuet et les jardins de Versailles sont des manifestations également et diversement belles du même génie, les créations littéraires du moyen âge français ne se sont pas réalisées dans une forme esthétique qui les rende comparables aux grands monuments de l’art roman ou gothique [1].

  1. Les études de M. Bédier, dont je parlerai au chapitre suivant, invitent à atténuer cette conclusion. Ses fines analyses font apparaître chez nos trouvères plus de génie épique et de grand goût qu’on n’était disposé à leur en accorder. Sa séduisante hypothèse fait du xie siècle une époque d’activité créatrice et de magnifique épanouissement comparable aux plus fécondes périodes de notre histoire littéraire (12e éd.).