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Page:Laperche - Ile inconnue.djvu/129

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SAINT-OLAF

Et élevant ses bras, elle croisa nerveusement ses mains au-dessus de sa tête, paumes en dehors.

— En attendant, ajouta-t-elle en souriant, je suis joliment contente d’avoir capté une Française pour un peu de temps.

Sur cette parole aimable, la demie de onze heures sonna, je donnai, en me levant, le signal de la retraite. Mon hôtesse m’imita. Nous souhaitâmes affectueusement le bonsoir à Rodney. Il nous accompagna à la porte, la tint ouverte devant nous. Dans cette attitude de l’Anglais sur le passage de la femme, il y a non seulement un hommage, mais une sorte de protection bien virile et qui me plaît mieux que le baise-main.

Edith n’avait pas encore trahi aussi ouvertement son état d’âme, un état d’âme que madame Baring ne comprendrait assurément pas, et qui la choquerait terriblement. La vie dans une petite ville de banlieue, l’oppressante médiocrité qui l’entoure, doivent cruellement gêner le jeu de son esprit et de tous ses instincts. Elle n’a jamais dû bien respirer dans cette atmosphère lourde et grise. C’est le cas de répéter la fameuse phrase : « Elle a besoin d’un changement… », oui, d’un grand changement. Plus je la vois, plus je m’étonne qu’elle ne soit pas mariée, d’autant mieux qu’ici, l’homme riche recherche par-dessus tout la beauté de la race. Quelle admirable châtelaine elle ferait ! Avec sa robe du soir, elle a grand air, tellement qu’elle semble sortir du cadre de la salle à manger. Et quelle compagne précieuse pour un Anglais, que cette femme aimant le cheval, le sport, la politique. Elle possède, de plus,