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SAINT-OLAF.

et les inscrivent aussitôt. Dans le même ordre, de la même allure, elles vont reprendre position et le petit exercice recommence et se poui’suit avec une précision mathématique.

J’ai remarqué sur le terrain des femmes de quarante, de cinquante ans. L’une d’elles, une grand’mère, m’a particulièrement amusée. Elle était là, tout à fait inconsciente de l’effet que pouvait produire un carquois et un arc avec sa taille épaissie et ses cheveux blancs. Elle envoyait flèche après flèche avec une rapidité, une sûreté presque automatiques. Le plaisir qu’elle y prenait rajeunissait sa physionomie. L’Anglaise n’abandonne un sport que quand elle s’y sent inférieure. Une Française l’abandonnera aussitôt qu’elle ne s’y sent plus jolie. Je me représentais des Parisiennes dans ce jeu aux beaux mouvements classiques, je les voyais, moulées dans des robes bien faites, tendant lentement et leurs corps et leurs arcs, mettant instinctivement en relief soit leur buste, soit leur hanche, visant, la pensée mal concentrée, le poignet nerveux, puis riant et babillant autour des cibles. Ce serait bien joli, mais ce ne serait pas à coup sûr du sport.

Le sport est entré dans nos mœurs, dans notre vie, dans notre sang comme un sérum. Nous observons ses règles mathématiques, mais nous y apportons nos défauts, nos qualités, nous y mettons de la passion, de la fougue, de l’âme même, une foule d’éléments qui n’y ont que faire, des éléments qui, cependant, ont souvent décidé et décideront encore de la victoire en notre faveur. Le sport saxon sera toujours plus correct, plus mâle, plus rude ; le sport latin, plus