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Page:Laperche - Ile inconnue.djvu/199

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SAINT-OLAF.

ma mère qui était fort belle. Elle lui a préféré mon père. Il n’a jamais pardonné ni à elle ni à lui.

— Je crois qu’un Anglais ressent plus profondément qu’aucun autre homme ces sortes d’échecs, dis-je alors.

Non sans surprise, je vis comme une onde d’émotion passer sur le visage de miss Baring.

— Oh ! il n’y a pas de doute. Une défaite quelle qu’elle soit lui est intolérable.

— C’est bien heureux que Loftshall ait été un fidéicommis.

— Assurément. Cependant, je ne veux pas croire que la rancune de M. Wilkes eût été jusqu’à nous en dépouiller au profit de la branche collatérale qui a fait souche en Amérique. Mère, seule, aura le droit de changer la ligne de descendance ; mais elle ne le fera pas. Loftshall passera d’abord aux mâles, à Rodney qui ajoutera le nom de Wilkes à celui de Baring. Par je ne sais quel arrangement, une partie de la fortune n’est pas liée. Elle devrait revenir à mon frère Jack et à moi ; si nous n’en sommes pas dépossédés, je serai une ieille fille riche voilà tout. Nous saurons cela après demain.

Sur ce mot, la voiture franchit la grille de Saint-Olaf.

Madame Baring dîna chez elle. Je devinai que les domestiques étaient au courant. Il y avait dans l’atmosphère de la maison une surexcitation mal contenue. La femme de chambre qui servait à table en avait perdu un peu de sa raideur d’automate. Elle lançait de furtifs regards vers ses maîtres et tendait ses oreilles visiblement. M. Baring avait télé-