Page:Lapicque - Notice sur les titres et les travaux scientifiques, 1908.djvu/68

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Pourtant, si l'on serre ce raisonnement, on voit qu'il n'est pas justifié. Nous avons affaire ici à un cas particulier.

Quand nous comparons des grands chiens à des petits chiens, ou des grands Sciurus carolinensis à des petits écureuils de la même espèce, nous pouvons arbitrairement limiter nos groupes, parce que nous les avons découpés dans une série continue. Ici les moyennes de l'homme et les moyennes de la femme, corps ou encéphale, nous sont donnés par la nature même des choses; nous avons affaire à deux catégories objectivement distinctes, et chacune de ces catégories a sa loi propre unissant la grandeur encéphalique à la grandeur corporelle, tandis que pour les grands ou les petits chiens, les petits ou les grands écureuils, c'est la même loi, avec seulement une valeur différente de la variable. Cette différence est si profonde qu'elle est sentie intuitivement même quand les lois auxquelles je fais allusion sont inconnues ou ne se présentent pas expressément à l'esprit. Par exemple, il est facile de constituer des séries soit de même taille, soit de même poids corporel, en prenant d'une part des hommes relativement petits, d'autre part, des femmes relativement grandes. A-t-on le droit ensuite de comparer en valeur absolue les moyennes encéphaliques de ces deux séries? Bien qu'il ait été donné une réponse affirmative à cette question, il semble que les naturalistes sentiront en général quelque chose de choquant à un tel procédé. Sexe à part, des femmes ayant en moyenne l m 60 ne seront pas identiques à des hommes de même taille ou de même poids moyen. Quand même il n'y aurait pas, comme cela existe en fait, un canon différent pour l'homme et pour la femme, de sorte que ces tailles, longueurs globales, ne correspondent pas à une même somme de parties; quand même il n'y aurait pas, comme cela existe en fait, une composition différente pour les tissus de l'homme et de la femme, de sorte qu'un même poids global correspond pour l'un et pour l'autre à des quantités différentes d'eau, de sels, de carbone, etc.; il suffit que l'un des groupes soit au-dessous pour que la comparaison directe soit discutable, sinon illégitime.

J'ai montré que chaque sexe, séparément de l'autre, suit pour la relation de l'encéphale au poids du corps, la loi intérieure d'une espèce, la proportionnalité à la racine quatrième. Par conséquent, nous voyons que la comparaison directe entre hommes et femmes de même poids constitue la même erreur que la comparaison du loup ou du renard à des chiens de même poids. Pour comparer la céphalisation du loup ou du renard à celle du chien, il faut faire le rapport du poids de l'encéphale à la puissance 0,56 du poids du corps avec les moyennes spécifiques, c'est-à-dire appliquer la formule propre aux espèces distinctes. J'étais ainsi amené, mathématiquement, à traiter de même l'homme et la femme, comme deux espèces distinctes. La forme inadmissible de cette proposition disparaît si on l'énonce de la façon suivante: dans le cas de dimorphisme sexuel qui nous occupe, la relation d'un sexe